Pourquoi Toulouse ne peut plus se passer de ses supercalculateurs

La Ville rose dispose de trois supercalculateurs classés dans le top 200 des machines les plus puissantes au monde. Deux d'entre eux permettent à Météo France de délivrer des prévisions nationales ultra-précises. Sur le site Clément Ader, un autre est utilisé à la fois par les chercheurs et les entreprises régionales, pour accélérer leur capacité de calcul et se maintenir face à la concurrence internationale.
Météo France dispose de deux supercalculateurs à Toulouse dont un à l'espace Clément Ader (voir ci-contre).

1 million de milliards d'opérations par seconde, c'est la capacité de calcul impressionnante des deux nouveaux supercalculateurs de Météo France à Toulouse. Ces énormes machines sont réparties sur deux sites : le premier est situé sur le site toulousain de Météo France (proche de Basso-Cambo), l'autre au sein de l'espace Clément Ader, dans le quartier de Montaudran, à Toulouse.

Dans cet espace inauguré fin 2014, Météo France partage ainsi une salle avec le Calmip, l'organisme régional de calcul, qui détient le premier supercalculateur inter-universitaire de France. Dans la gigantesque pièce, les deux ordinateurs sont face à face. Ces armoires d'environ trois mètres de haut contiennent plusieurs milliers de processeurs chacune.

Un bond technologique

D'un côté, la machine de Météo France. Classé 105e dans le dernier TOP 500 des machines les plus puissantes au monde, le supercalculateur permet à l'organisme de faire un bond technologique en termes de prévisions. Avant son arrivée, les prévisions météorologiques sur le territoire national ne concernaient que les phénomènes visibles sur plus de 2,5 km, ce qui laissait de côté les événements violents très localisés. Depuis le 13 avril dernier, ce seuil est descendu à 1,3 km. En devenant deux fois plus précise, Météo France peut désormais se concentrer sur des phénomènes à toute petite échelle : nappes de brouillard, orages, pollution...

"Ces modèles vont nous permettre d'être plus précis lors des épisodes cévenols dans le Sud-Est de la France et lors des cas de vigilances orange ou rouge, où les enjeux économiques sont très forts", estime Alain Beuraud, chef de projet du supercalculateur Météo France à Toulouse.

L'institut météorologique veut également augmenter la fréquence de ses bulletins.

"D'ici cet été, nous allons rafraîchir nos prévisions toutes les heures au lieu de 4 fois par jour actuellement. Cela intéresse notamment les aéroports pour prévoir les épisodes d'orages ou de brouillard", poursuit Alain Beuraud.

Un enjeu primordial pour les entreprises

Mais le calcul intensif n'est pas seulement utilisé par les spécialistes du climat, loin de là. Chercheurs et entreprises sont très demandeurs en la matière.

"Depuis 2010, les besoins sont passés de 10 à 50 millions d'heures de calcul, soit 5 fois plus en 4 ans", relève Boris Dintrans, le directeur du centre de calcul régional Calmip.

Cet essor s'explique : les chercheurs peuvent pratiquer sur un supercalculateur "le calcul en parallèle". Autrement dit, au lieu de faire tourner leurs modèles de calculs sur un seul ordinateur équipé d'un processeur, ils les font tourner sur un grand nombre de processeurs. À l'espace Clément Ader, il est ainsi possible de calculer sur plus de 12 000 processeurs simultanément. De quoi générer un gain de temps considérable. "Imaginez, s'il vous faut 100 journées pour réaliser un calcul sur un seul processeur. Avec 100 processeurs, il vous suffira de 24 heures pour y parvenir", schématise Boris Dintrans.

Classé 183e au dernier classement des superordinateurs mondiaux, le supercalculateur du Calmip est aujourd'hui utilisé pour plus de 200 projets de recherche sur lesquels travaillent 400 chercheurs de la région Midi-Pyrénées. Les disciplines représentées sont diverses et variées .

"Les trois principales thématiques sont la mécanique des fluides, la physique-chimie des matériaux et les sciences de l'univers, avec notamment l'astrophysique, poursuit l'astrophysicien. Cela va du projet de recherche pour observer la structure interne des étoiles, au labo qui regarde l'impact des barrages sur les poissons."

Le calcul intensif est également utilisé pour les entreprises régionales du secteur aéronautique et spatial. "Les calculs de simulation permettent de détecter l'impact d'un éclair de foudre sur un avion ou de déterminer la quantité de givre qui peut venir s'y déposer", avance Boris Dintrans. Actuellement, six entreprises utilisent le supercalculateur de Calmip, parmi lesquelles figurent des grands comptes, à l'image d'Airbus, Safran mais aussi des PME. En s'appuyant sur le supercalculateur de Calmip, la PME toulousaine Nexio Simulation (spécialisée dans la conception et l'édition de logiciels de simulation électromagnétique pour l'aéronautique) a ainsi remporté un appel d'offres au Japon, qui représente deux contrats majeurs pour son développement.

Les performances des supercalculateurs toulousains ne doivent cependant pas masquer le retard de la France en la matière. En 2005, un rapport d'experts plaçait notre pays à l'avant-dernière place des pays européens industrialisés en termes de puissance de calcul installée par habitant...

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