Débat sur la compétitivité à Toulouse, les réactions aux mesures annoncées par Jean-Marc Ayrault

Nouveau crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et augmentation de la TVA : les deux mesures phares annoncées par Jean-Marc Ayrault suite au rapport Gallois sur la compétitivité doivent permettre de réduire le coût du travail de 6% et de créer 300 000 emplois d'ici 2017. Des « moineaux » créateurs de start-up au Medef, en passant par la CGT, les réactions en Haute-Garonne sont nombreuses... et différentes.
Louis Gallois et Jean-Marc Ayrault

Nouveau crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et augmentation de la TVA : les deux mesures phares annoncées par Jean-Marc Ayrault suite au rapport Gallois sur la compétitivité doivent permettre de réduire le coût du travail de 6% et de créer 300 000 emplois d'ici 2017. Des « moineaux » créateurs de start-up au Medef, en passant par la CGT, les réactions en Haute-Garonne sont nombreuses... et différentes.

Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) annoncé par le Premier ministre la semaine dernière doit permettre de réduire de 6% le coût du travail tout en favorisant l'emploi. Il n'affecte pas le financement de la protection sociale et sera proportionnel aux salaires versés par l'entreprise, seuls ceux inférieurs à 2,5 SMIC étant pris en compte. Il s'agit d'un crédit d'impôt donc en principe imputable sur l'impôt sur les sociétés (ou l'impôt sur le revenu) pour les entreprises bénéficiaires, et remboursable aux entreprises qui sont déficitaires et ne paient pas d'impôt sur les bénéfices. Ce dispositif représentera 10 Mds€ en 2013, 15 en 2014 et ensuite 20 Mds€ par an.

Autre annonce commentée : la hausse de la TVA. Le gouvernement va porter le taux normal de 19,6% à 20% à compter de 2014 et le taux intermédiaire de 7% à 10%. Le taux réduit sur les produits de première nécessité sera abaissé à 5%.

Les réactions

Guy Pressenda, UMIH 31 : "Nous sommes totalement contre une augmentation de la TVA. Cela remet en cause les accords que nous avons avec les partenaires sociaux concernant les primes TVA, les augmentations, les jours fériés, etc. Pour nous, un point de TVA en plus, c'est 10 000 emplois en moins."

Cédric Caubère, CGT 31 : " Ces mesures sont des mesures d'austérité dont les salariés vont payer le prix. Un véritable cadeau de 30 Mds € aux entreprises, inspiré par le rapport rédigé par un grand patron. La baisse du coût du travail signifie la baisse des salaires, c'est évident. Le crédit d'impôt va être financé par une baisse des dépenses des collectivités locales. Une baisse des dépenses publiques, cela veut dire une diminution des services aux salariés, comme l'hôpital par exemple. Le problème est toujours le même : la répartition des richesses entre les actionnaires et les salariés. Nous appelons à manifester mercredi 14 novembre à Toulouse dans le cadre d'une journée européenne contre l'austérité et pour une Europe sociale."

Philippe Robardey, MEDEF 31 : "Un effort est fait pour la compétitivité des entreprises et de l'économie en général, nous y sommes très favorables. Pour une fois on aide les entreprises au lieu de leur taper dessus, la tendance semble donc s'inverser et tant mieux! Il y a deux inconvénients cependant au choix du crédit d'impôt au lieu d'une baisse des charges sociales : la protection sociale n'est pas transférée vers la consommation, ce que nous souhaitions car les travailleurs payent pour des services utilisés par tous les français, comme les allocations familiales par exemple. Le deuxième inconvénient : avec une baisse des charges sociales, on aurait amélioré le résultat d'exploitation de l'entreprise, ce qui lui permet d'obtenir plus facilement des crédits quand les établissements bancaires demandent à ce que la dette ne représente pas plus de deux fois le résultat, par exemple. Avec le crédit d'impôt, le résultat avant impôt n'augmente pas. Pour les entreprises un peu « ric-rac » sur leurs résultats, cela induit des difficultés à emprunter."

Bernard Ourmières, CGPME 31 : "Nous sommes dans une position attentiste. Nous souhaitons prendre connaissance des textes détaillés. Pour le moment, le crédit d'impôt est un effet d'annonce, on ne touche pas au vrai problème de notre pays: le coût horaire du travail, qui est trop cher. Ce crédit d'impôt c'est comme si on promettait à un salarié un bon d'achat pour 2014: cela n'est pas suffisant. En ce qui concerne l'augmentation de la TVA de 7% à 10% notamment dans la restauration: on prend les français en otage, on punit le consommateur."

Jean Luminet, IUMM Midi-Pyrénées : " Les voix des chefs d'entreprises et de l'industrie ont été entendues. Il était temps ! Cependant, le gouvernement a, hélas, amoindri l'efficacité du dispositif au travers de certains aménagements (calendrier d'application des baisses de charges, baisse des charges significative mais à mettre en perspective avec les hausses considérables décidées par la deuxième loi de finances rectificative d'août 2012...). Cela nous conforte dans l'idée que ce Pacte ne peut constituer que la première étape dune solution à penser plus largement. Le retard pris et l'ampleur de la crise nécessitent en effet d'aller plus loin. Nous serons donc très vigilants sur la mise en œuvre des décisions annoncées par le gouvernement et consacrerons toute notre énergie à la mise en place de l'étape suivante, à savoir, le financement de la protection sociale."


Bernard Guillot de Suduiraut, avocat fiscaliste associé au cabinet Fidal, à Toulouse : "Le CICE est sans doute une bonne mesure de soutien mais elle présente un inconvénient : il y a un "effet retard" puisque le crédit d'impôt sera calculé en fonction des résultats de 2013, donc accordé effectivement en 2014. C'est donc une mesure à terme. Le gouvernement, conscient de cette difficulté a annoncé que des mesures seront prévues pour les PME afin qu'elles puissent bénéficier de l'effet du CICE plus rapidement, sans doute par le biais d'avances. Ceci est important car une annonce non suivie d'effet rapide est plus démobilisante qu'autre chose. Il est prévu, sans actuellement de précisions sur les modalités, que l'utilisation de ce crédit d'impôt soit contrôlée : il n'est pas destiné à être distribué aux actionnaires ! Dans les PME et plus particulièrement les plus petites qui n'ont pas toutes d'institutions représentatives du personnel, ce contrôle sera difficile à organiser."

Mathieu Pauc, créateur de MPH Conseil et MPH Immo, « moineau » toulousain (mouvement informel de jeunes créateurs d'entreprises, solidaires du mouvement des pigeons) : "Le rapport Gallois est une bonne chose dans le sens où tout entrepreneur peut se satisfaire que son pays mette la compétitivité économique au cœur du débat, mais il faut être conscient que c'est un rapport orienté en première intention vers l'industrie et l'emploi industriel qui pèse seulement 12% des emplois en France. 200 000 emplois peuvent être créés chaque année grâce aux start-ups et aux PME, si on décide de les soutenir de manière audacieuse ! Pour les moineaux, les logiques sont souvent très différentes que pour les grandes entreprises. Par exemple, pour ce qui est de la mesure principale du crédit d'impôt compétitivité emploi, un moineau aurait préféré voir diminuer les charges qu'il va payer chaque mois jusqu'au printemps 2014, en raclant souvent les fonds de tiroir de sa trésorerie jusqu'à la dernière minute. Ce crédit d'impôt, compte tenu de l'activité très aléatoire des start-ups, est un dispositif plus flou pour lui, dont il ne peut vraiment ressentir ni programmer les bénéfices comme le feront les grandes entreprises dès 2013."

En kiosques, retrouvez le dernier numéro d'Objectif News consacré à la crise: "Toulouse à la recherche de la croissance perdue" avec de nombreuses réactions, et des témoignages des acteurs économiques de Midi-Pyrénées.

Sophie Arutunian
Crédit photo Rémi Benoit

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