Comment les notaires sont passés de la plume à la signature électronique

Nouveau président, nouveaux locaux, mise en place de la signature électronique... la chambre interdépartementale des notaires de l’Ariège, de la Haute-Garonne, du Tarn et du Tarn & Garonne a connu ses derniers mois de très nombreux changements. Élu le 17 mai dernier, Philippe Pailhès détaille comment il va faire face à cette profonde transformation de la profession.
Philippe Pailhès a été nommé le 17 mai dernier président de chambre des notaires interdépartementale.
Philippe Pailhès a été nommé le 17 mai dernier président de chambre des notaires interdépartementale. (Crédits : Reuters-ShakersMakers/JMD/2018)

Philippe Pailhès est le nouveau président de la chambre interdépartementale des notaires de l'Ariège, de la Haute-Garonne, du Tarn et du Tarn & Garonne. Nommé le 17 mai dernier, il participera durant les deux années à venir au rayonnement et développement de l'institution.

Toulousain de naissance, il a effectué ses études au lycée Saint-Sernin. Il a ensuite fait des études de droit à la faculté de Toulouse. "Durant mes études universitaires, je me suis intéressé à l'immobilier mais pas tellement au notariat, puisque ma spécialité d'origine est l'urbanisme et la construction", raconte-t-il. Il fait ses premier pas professionnels, en 1982, dans un cabinet de gestion immobilière où il reste durant quatre années. Il est vite rattrapé par le notariat en 1986 lorsqu'il est sollicité pour rejoindre l'étude de Me Castela, située rue Bayard. "J'ai à l'époque renforcé l'étude sur les pratiques immobilières", se souvient-il. Il deviendra ensuite notaire associé au sein de cet office en 1992.

"Quelques corrections à faire sur la loi Macron"

Ce notaire arrive à la tête de la chambre interdépartementale à une période de chamboulements organisationnels. En effet, la loi Macron de 2014 a en plus de la baisse des prix de certains actes, faciliter l'ouverture d'études afin de raviver la concurrence. À l'époque, il était possible d'entrer dans la profession de deux manières : l'association ou par concours. Emmanuel Macron, ministre de l'Économie avait alors imaginé le système de l'horodatage qui permet à toute personne diplômée en notariat de s'inscrire sur une banque de données gérée par le ministère de la Justice et par tirage au sort, être nommée à la résidence qu'elle souhaite et ainsi ouvrir son étude.

"Emmanuel Macron a voulu casser ses cadres qu'il considérait comme un frein au développement et à l'accès des plus jeunes à notre profession. Ce système à un avantage qui est la libéralisation, mais il a également quelques inconvénients. D'une part il conduit à une arrivée massive de notaires sur le marché. Il faut savoir que pour notre compagnie cela représente 61 créations sachant qu'elle est déjà forte de 422 membres. Donc nous serons 483 membres à terme. Il y aura 52 créations de postes à Toulouse, 2 dans l'Ariège, 5 dans le Tarn et Garonne et 2 dans le Tarn. L'essentiel des créations a lieu dans Toulouse et son agglomération, à tel point que cela conduit à des aberrations. Par exemple à Balma, il n'y avait pas de notaires, les candidats ont donc horodaté de manière aveugle sur ce territoire là. D'un seul coup alors qu'un seul aurait été suffisant, trois notaires se sont installés. Ce système a le mérite de la libéralisation, mais il a quelques inconvénients sur lesquels nous souhaitons quelques corrections", explique Philippe Pailhès.


Pour l'instant confiant, Me Pailhès craint qu'à terme, le marché ne puisse pas absorber l'ensemble de ses nouveaux arrivants, appelés créateurs dans la profession.

"Heureusement que ces arrivées tombent au cours d'une époque assez active sur le marché de l'immobilier, sachant que 60% de notre activité est issue de l'immobilier et les 40% autres, des activités familiales (successions, des partages, des divorces...). Or, ces activités sont cycliques, la tendance dans les années va donc ralentir. Nous allons vivre l'augmentation des taux d'intérêt et le prélèvement à la source qui vont avoir un impact sur notre marché et les habitudes", pressent-il.

Différents axes à développer

Une des volontés du nouveau président de la chambre des notaires, est l'accueil des créateurs. "Nous souhaitons les intégrer dans notre culture, nous jugeons particulièrement utile de les aider". Un certains nombre d'outils ont été mis en place : des séances d'accueil et de formation dédiées à la prise de connaissance des différentes institutions (judiciaire, pénale, assurances...) et de la chambre des notaires elle même avec toutes ses composantes et ses services.

"J'ai souhaité aller plus loin avec la création d'une cellule d'accompagnement assez originale dans la mesure où j'ai fait appel aux anciens notaires qui sont des hommes et des femmes d'expérience. Une expérience qu'ils peuvent mettre à disposition des créateurs qui leur permettra d'avoir un groupe de référents en cas de préoccupation", projette Philippe Pailhès.

Cette cellule pour l'instant en cours de constitution, sera fonctionnelle dès la rentrée. À cette même période seront organisés les états généraux des créateurs, pour qu'ils puissent faire des retours d'expériences afin que la chambre puisse leur apporter une aide utile.

Une profession qui se modernise

La modernisation des pratiques et des outils est le deuxième axe de son mandat.

"Le métier passe pour une profession vieille et ancienne qui fonctionne à la plume et au pochoir alors qu'elle se tranforme. Le congrès des notaires est un catalyseur, il a donné de bonnes idées aux pouvoirs publics pour ensuite y adapter des lois qui s'imposent".

Parmi ces idées devenues réalité, la création d'un fichier central où sont référencés tous les testaments faits chez un notaire. "Cet outil permet par exemple de plus facilement retrouver des testaments faits il y a 26 ans chez un notaire à Montpellier à Lyon ou à Strasbourg", illustre le Me Pailhès


Cependant, la plus grande évolution que le notariat a connu, est le développement récent de l'acte électronique. Aujourd'hui on ne signe plus ou quasiment plus sur la version papier chez le notaire.

"Nous sommes la seule profession qui a été autorisée à ce que l'acte électronique ait la même valeur que l'écrit traditionnel. Ceci a été labellisé par le ministère de la Justice. Cet acte électronique au delà du caractère spectaculaire et confortable, s'engage sur la pratique du zéro papier. Un objectif difficile à obtenir surtout chez les notaires".


Les échanges avec l'administration sont désormais plus faciles et courts, avec la télétransmission des données. "L'administration fiscale, notamment, a vu dans le dématérialisation des échanges un moyen de gérer une réduction des effectifs et de faire des recoupements de données". Cette dématérialisation permet aux notaires de transmettre la version numérique de l'acte qu'il vient de signer qui va être enregistré de manière électronique sur le fichier centrale qui avant était une fiche papier tenue de manière manuscrite.

"On peut répondre à cette exigence moderne qu'est l'immédiateté dans les transactions. La dématérialisation est en cours, elle est de plus en plus significative dans notre pratique quotidienne et elle ira plus loin. C'est un des axes majeurs de mon mandat de soutenir cette modernisation".

Un outil de visioconférence sera également mis en place dès la rentrée prochaine. Celui-ci permettra de répondre à des soucis de mobilité.

"Par exemple lors de la signature d'un acte, si un client est à Paris et l'autre à Toulouse, chacun pourra garder son notaire dans sa ville et grâce à la visioconférence il sera possible en temps réel de pratiquer une signature électronique à distance."

Sur les territoires les plus éloignés et pour les populations les plus affaiblies, notamment les personnes âgées, des études de processus d'identification sont en cours pour que de chez elles, ces personnes puissent authentifier certains actes de notaires. 
La prise de rendez-vous par internet chez un notaire est également envisagée. Toujours via internet, les clients pourront avoir accès et consulter l'avancement de leur dossier. "Il y aura une totale transparence grâce à ses outils développés par le conseil supérieur du notariat".

Cependant, Philippe Pailhès préconise la vigilance face à cette dématérialisation qui s'installe peu à peu dans le quotidien des notaires et de leurs clients.

"Il ne faut pas que ce soit une cause de déshumanisation. Le bon notaire sera moderne, utilisera tous ces outils et n'oubliera pas le client", conseille-t-il. 

Des bureaux flambant neufs

La chambre interdépartementale des notaires de l'Ariège, de la Haute-Garonne, du Tarn et du Tarn & Garonne s'est également dotée de nouveaux locaux modernes d'une surface de 820 m2 situés 11 boulevard des Récollets, dans l'immeuble le Belvédère à Toulouse. "Nos anciens locaux très haussmanniens, très bourgeois ne correspondent pas à l'image de marque de notre profession qui se rajeunie et modernise". 

Dorénavant, ces nouveaux bureaux s'inscrivent "dans la cité et dans le partage" avec d'autres professions. 

"Si nous sommes dans cet immeuble fédéral, ce n'est pas le fruit du hasard. C'est parce qu'il y des experts-comptables, la fédération du bâtiment, l'agence de l'urbanisme... Le notaire ne doit pas s'isoler mais s'incorporer dans la société et les préoccupations sociales".

Les notaires extérieurs à la ville pourront recevoir leurs clients toulousains dans ces locaux. "Je souhaite que cette chambre ne soit pas qu'une maison réservée aux notaires, mais un lieu d'échanges, de rencontres, voire d'exposition", avance Philippe Pailhès. Des petits-déjeuners, des afterwork, des conférences... y seront organisés.

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