Menacés par une directive européenne, les e-commerçants craignent pour leur survie

Une directive relative aux droits des consommateurs, votée le 24 mars dernier par le Parlement européen, a mis le feu aux poudres chez les e-commerçants. Nombre de ces derniers estiment que l'application de ces dispositions est de nature à menacer leur activité. En Midi-Pyrénées, la mobilisation est forte.Le 24 mars dernier, les députés du Parlement européen adoptaient la première mouture d'une nouvelle loi proposant une série de mesures visant à mieux protéger les acheteurs en ligne.

Une directive relative aux droits des consommateurs, votée le 24 mars dernier par le Parlement européen, a mis le feu aux poudres chez les e-commerçants. Nombre de ces derniers estiment que l'application de ces dispositions est de nature à menacer leur activité. En Midi-Pyrénées, la mobilisation est forte.

Le 24 mars dernier, les députés du Parlement européen adoptaient la première mouture d'une nouvelle loi proposant une série de mesures visant à mieux protéger les acheteurs en ligne. L'idée est noble mais a du mal à passer chez les e-commerçants, qui jugent beaucoup trop contraignantes les dispositions à prendre. Sandrine Lavigne, fondatrice du site Planicook basée près de Toulouse, juge ainsi les mesures « complètement farfelues » et tire la sonnette d'alarme. « Alors que les textes sont étudiés depuis 2008 avec les principaux acteurs du e-commerce, le parlement de l'UE a adopté une série de mesure qui pousse le e-commerce dans ses retranchements, explique-t-elle. Malgré une croissance de 15% par an, la génération de création d'emploi importante en France et en Europe, notre profession est gravement menacée ! »

Le texte adopté en première lecture prévoit que les livraisons devront être réalisées dans un délai de trente jours, sans quoi la vente sera annulée. La Fédération des entreprises de la vente à distance (Fevad) indique dans un communiqué : « Alors que dans la majorité des pays européens, le client dispose de 7 jours pour changer d'avis et retourner le produit, l'Europe a décidé d'étendre à deux fois 14 jours la durée légale du droit de rétractation. Le client disposera de 14 jours pour indiquer qu'il se rétracte, puis à nouveau de 14 jours pour retourner le produit. Au total, le délai de rétractation est donc porté à un mois. « Le e-commerçant devra se rendre accessible à l'Union européenne en mettant en place des sites acceptant sept monnaies, 27 protocoles de livraison, traduits en 25 langues », détaille Sandrine Lavigne. Qui pointe un autre point décrié : « La double validation de panier. Mr le client, vous êtes sûr de vouloir acheter ? Oui, ok validez mais vous êtes vraiment sûr ? Ok, revalidez. Imaginez le taux d'abandon du panier ! »

Vers une hausse des prix ?

Sandrine Lavigne ne conteste pas l'intérêt de ces mesures pour le consommateur. Mais elle estime aussi que « les clients ne sont pas prêts à payer plus cher leur achat en ligne mais c'est pourtant ce qui se passera, compte tenu de l'augmentation de nos charges : packaging différent, frais de retour trop importants... Les coûts engendrés devront fortement être répercutés sur les prix. Ces mesures ont été évaluées à 5% du CA annuel ! Pour une petite structure, ce sera difficile à assumer. Les clients ne seront pas prêts non plus à voir disparaître la diversité des offres, la créativité des petites boutiques en ligne et leur originalité. Demain, si ces mesures sont adoptées nous irons vers la disparition d'un grand nombre d'entre nous qui débouchera sur une uniformisation des produits. » Fondateur des sites Vente du Diable et de Ckado, Stéphane Contrepois ne décolère pas lui non plus : « La Fevad demande au gouvernement de s'opposer à la directive e-commerce, c'est rassurant car elle ne peut pas passer. »

Sandrine Lavigne ajoute : « Une pétition en ligne a été lancée (consultable ici) le 29 mars. Elle sera transmise au Parlement européen, au ministre de l'Économie numérique Éric Besson, à la Fevad et s'il le faut nous dépasserons les frontières. » Éric Besson qui estimait, le 30 mars, que ces mesures « ne doivent pas aboutir à un déséquilibre en défaveur de l'e-commerce ». Il a notamment évoqué celle qui concerne le remboursement des frais de retour : « Cette mesure ne me paraît pas raisonnable. Elle entraînerait inéluctablement une hausse des prix pour le consommateur. »

Un collectif mené par Sandrine Lavigne et d'autres e-commerçants de toute la France, "Touche pas à ma e-boutique", a lancé le 25 mars un groupe sur Facebook qui compte déjà plus de 800 membres. Signe de l'inquiétude ambiante...

La Mêlée, association fédératrice des acteurs de l'économie numérique dans le Sud-Ouest, « soutient bien sûr fermement le collectif "Touche pas à ma e-boutique" qui s'est constitué sur les réseaux sociaux, affirme son président Édouard Forzy. Il est prévu lors de la Mêlée numérique (les 20 et 21 avril à Diagora Labège, ndlr) une rencontre sur le sujet, à laquelle seront conviés bien sur les principaux concernés mais aussi les principaux représentants régionaux des entreprises commerciales, c'est à dire la Chambre régionale de commerce et d'industrie et la Chambre de commerce et d'industrie de Toulouse, en la personne de leurs présidents respectifs afin d'obtenir leur entier soutien sur le sujet. »

La directive sera-t-elle suivie d'effets ? Le Parlement européen doit désormais négocier avec la Commission européenne et les représentants des gouvernements, le Conseil de l'Union. Si les trois sont d'accord, le vote final aura lieu au Parlement dans les prochains mois, vraisemblablement d'ici l'été.

Mikaël Lozano

En photo : les acteurs du e-commerce craignent que la nouvelle directive européenne, si elle est adoptée, mette à mal leur santé économique (© Rémi Benoit)

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