Midi-Pyrénées va fusionner avec Languedoc-Roussillon. Les pour, les contre, réactions aux annonces du président

Les réactions se multiplient depuis ce matin. Dans une tribune parue ce mardi 3 juin, François Hollande a officialisé la réduction du nombre de régions de 22 à 14. La carte dévoilée fusionne Midi-Pyrénées avec Languedoc-Roussillon, ce qui regroupe 6 millions d'habitants. Une option soutenue, entre autres, par le président de la Région Midi-Pyrénées Martin Malvy, mais qui suscite de nombreuses oppositions. Le président de Languedoc-Roussillon parle même d'"humiliation".
La nouvelle carte de 14 régions proposée par François Hollande

Les réactions se multiplient depuis ce matin. Dans une tribune parue ce mardi 3 juin, François Hollande a officialisé la réduction du nombre de régions de 22 à 14. La carte dévoilée fusionne Midi-Pyrénées avec Languedoc-Roussillon, ce qui regroupe 6 millions d'habitants. Une option soutenue, entre autres, par le président de la Région Midi-Pyrénées Martin Malvy, mais qui suscite de nombreuses oppositions. Le président de Languedoc-Roussillon parle même d'"humiliation".

François Hollande met fin à plusieurs semaines de rumeurs. Ce matin 3 juin, le président de la République a publié dans la presse quotidienne régionale et le site officiel de l'Élysée une tribune détaillant son projet de réduire le nombre de régions françaises. La carte dévoilée laisse apparaître 14 nouvelles régions, au lieu de 22 actuellement, sans démembrement, avec notamment une fusion entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon.

Ces 14 régions seront "de taille européenne et capables de bâtir des stratégies territoriales, écrit le chef de l'État. Demain, ces grandes régions auront davantage de responsabilités. Elles seront la seule collectivité compétente pour soutenir les entreprises et porter les politiques de formation et d'emploi, pour intervenir en matière de transports, des trains régionaux aux bus en passant par les routes, les aéroports et les ports. Elles géreront les lycées et les collèges. Elles auront en charge l'aménagement et les grandes infrastructures. Pour remplir leur rôle, elles disposeront de moyens financiers propres et dynamiques. Et elles seront gérées par des assemblées de taille raisonnable. Ce qui veut dire moins d'élus."

François Hollande avait annoncé ce nouveau volet de la réforme territoriale lors d'un discours prononcé en janvier dernier. Selon André Vallini, secrétaire d'État à la Réforme territoriale, elle pourrait générer 12 à 25 Md€ d'économies dans le fonctionnement des collectivités. Cette fusion des régions, qui doit être soumise au débat parlementaire, pourrait intervenir d'ici le 1er janvier 2017. Selon le président de la République, elle sera suivie de la suppression des conseils généraux, d'ici à 2020.

Ils sont "pour"
Le président du Conseil régional de Midi-Pyrénées, Martin Malvy, a réagi dès hier soir à cette nouvelle carte de France, approuvant ce redécoupage (lire notre article). Face aux nombreuses réactions, notamment l'opposition de son homologue du Languedoc-Roussillon Christian Bourquin, il a publié un nouveau communiqué cet après-midi : "Midi-Pyrénées aurait pu être rapprochée d'Aquitaine. Beaucoup y avaient pensé. À ne regarder que ces deux Régions le projet avait toute sa pertinence. Mais dans cette hypothèse, Languedoc-Roussillon se serait retrouvée enserrée entre deux Régions qui auraient été parmi les plus puissantes, PACA d'un côté, Midi Pyrénées - Aquitaine de l'autre. Ce n'aurait été, je pense, ni à son avantage ni à celui du Grand Sud qui doit pouvoir se construire à égalité de capacités avec PACA, Rhône-Alpes et la Catalogne."

Joint ce soir par téléphone, Martin Malvy a ajouté qu'"il serait naturel que la capitale de cette nouvelle région soit Toulouse car elle est la 4e ville de France. Il faudra ensuite trouver le statut de Montpellier qui est une ville importante. Quelles responsabilités seront exercées dans ce qui sera la seconde ville de la région? demande-t-il. La capitale sera le lieu où l'on siège, mais il y a plusieurs instances dans une Région. Il faudra créer une harmonisation entre les territoires." Le président de Midi-Pyrénées tient aussi à souligner qu'"il ne s'agit pas d'une fusion, pas d'une absorption, mais d'une création d'une nouvelle région, constituée de 13 départements." À noter également que, selon Martin Malvy, "Midi-Pyrénées - Languedoc-Roussillon sera l'une des régions les plus puissantes en terme de PIB, qui s'élèvera à 145 Md€."

Autre partisan de ce regroupement entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon : Daniel Thébault. Le président du Medef Midi-Pyrénées évoque même le nom que pourrait porter la nouvelle Région : "Nous formons le Pays d'Oc." Selon lui, "les relations entre les deux régions sont déjà fortes. Nous formons depuis longtemps un espace de coopération. Probablement plus qu'avec Aquitaine. Avec deux grandes métropoles comme Toulouse et Bordeaux, ce n'était pas jouable." Toutefois, Daniel Thébault tient à préciser que la réforme territoriale ne freinera pas la coopération entre les entreprises de Midi-Pyrénées et Aquitaine : "Elle ne remettra pas en cause la pertinence d'un pôle aéronautique commun entre les deux territoires. Les sociétés dépasseront les frontières administratives."

Ils sont mitigés
Plus réservée, Agnès Paillard se dit "un peu déçue". Pour la présidente du pôle de compétitivité Aerospace Valley, qui associe Midi-Pyrénées et Aquitaine, une fusion entre ces deux régions aurait été "intéressante, car cela aurait ramené les régions à notre périmètre. Mais le rapprochement avec Languedoc-Roussillon ne remet en cause ni notre organisation ni notre action, nuance-t-elle. Cela n'empêchera pas les entreprises de Midi-Pyrénées et d'Aquitaine de continuer à travailler ensemble." Et d'ajouter : "Pour le secteur aéronautique, je ne vois pas forcément de synergies possibles avec Languedoc-Roussillon."

"Je suis un peu surpris de ce choix", réagit de son côté Didier Gardinal, le président de la CCI Midi-Pyrénées, pour qui "il y a entre les régions Midi-Pyrénées et Aquitaine une véritable dynamique économique et culturelle." Il reste toutefois partagé : "Un rapprochement avec Languedoc-Roussillon n'aurait pas que des inconvénients. Montpellier, Toulouse et Barcelone ont déjà tissé d'importantes relations universitaires, par exemple. Et cela offrirait à Midi-Pyrénées une ouverture vers la Méditerranée."

Le président du Conseil général de la Haute-Garonne Pierre Izard se réjouit sur un point : "Selon les termes de la dernière déclaration du président de la République, l'examen du projet de suppression du Conseil général est repoussé à l'horizon 2020. Ce délai de 5 ans démontre que les Conseils généraux ont été entendus dans leur demande que toute décision sur une nouvelle architecture des pouvoirs locaux ne soit pas engagée dans l'urgence et la précipitation." Rappelons que les élus départementaux ont adopté la semaine dernière une motion contre la suppression des Départements (lire notre article). Toutefois, rien n'est gagné : "Continuons à démontrer que rayer le Conseil général de la carte des collectivités territoriales au nom d'économies potentielles non vérifiées, c'est irrémédiablement tuer l'action de proximité, d'innovation et d'efficacité du service public départemental. Je continuerai ce combat avec vigilance et détermination", affirme-t-il dans un communiqué.

Dans le clan des mitigés, on retrouve aussi Jean-Luc Moudenc. "Il y a le fond et la forme, remarque le maire UMP de Toulouse et président de l'association des maires de grandes villes de France (AMGVF). C'est une réforme spectaculaire sur la forme, anecdotique sur le fond, car la vraie question est celle des compétences. Ce qui me paraît plus important, ce sont les moyens nouveaux, les pouvoirs nouveaux des ces régions renforcées d'un côté, et des métropoles de l'autre. Le partage des compétences départementales entre les régions et les métropoles, quel calendrier ?", s'interroge le maire toulousain.

Les élus EEL-LV à la Région ont également une réaction mitigée : "Le nouveau découpage - bloc à bloc - constitue une vision réductrice et aberrante de ce que devrait être la réforme territoriale. Si la proposition de réunir les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon nous paraît être une véritable opportunité, il n'en est pas de même sur tout le territoire", écrivent-ils dans un communiqué.

Ils sont "contre"
Les opposants à cette nouvelle carte de France sont plus nombreux que les partisans. Parmi les plus virulents : Christian Bourquin. Le président de Languedoc-Roussillon rejette purement et simplement la fusion annoncée avec Midi-Pyrénées. Il parle même d'"humiliation pour les hommes et les femmes qui oint hissé ce Languedoc-Roussillon tel qu'on le connaît aujourd'hui". D'après le socialiste, sa région est celle "qui crée le plus d'emplois, 30.000 l'an dernier." Par conséquent, elle mériterait une exception, au même titre que l'Aquitaine et la Corse qui ne voient pas leurs contours modifiés. Le Conseil régional a d'ailleurs mis en ligne une pétition baptisée "Languedoc-Roussillon, notre avenir commun", invitant les habitants à manifester leur désir de conserver la région dans son périmètre actuel.

Également remontés, les radicaux de gauche. Dans un communiqué commun, le président du Parti radical de gauche et président du conseil général du Tarn-et-Garonne Jean-Michel Baylet, ainsi que les chefs de file des députés et des sénateurs PRG, Jacques Mézard et Roger-Gérard Schwartzenberg, protestent contre un "coup de force". Ils critiquent "une réforme à marche forcée, où l'on fusionne des régions qui n'ont aucune histoire ni tradition en commun." Toujours selon ce communiqué, les radicaux de gauche s'opposeront à la réforme territoriale "au nom de leur engagement républicain et laïque".

Gérard Trémège, président (UMP) du groupe d'opposition Républicains&Territoires au Conseil régional de Midi-Pyrénées n'est pas non plus convaincu : "Outre l'absence de concertation avec les élus locaux, la reconfiguration de la carte des Régions soulève plusieurs problèmes. En premier lieu, celui de la pertinence du périmètre retenu. Qu'ont, en effet, en commun les Hautes-Pyrénées et l'Ariège avec la Lozère et le Gard ?", demande-t-il dans un communiqué.

Laurence Massat, quant à elle, dénonce une réforme territoriale "à la va-vite, sans concertation et sans logique". Selon la déléguée départementale UDI 31, la méthode employée n'est pas la bonne : "Il aurait sans doute été plus efficace de commercer par supprimer les 101 conseils généraux et répartir leurs compétences entre intercommunalités et régions (...) Ce sujet est reporté en 2020, autant dire aux calendes grecques. Et dans un deuxième temps, travailler à la constitution de grandes régions", conclut-elle.

Toujours chez les centristes, l'UDI Bernard Lusset, qui défend la fusion entre Midi-Pyrénées et Aquitaine, regrette que "cette option ait été balayée d'un revers de main, elle n'a même pas été étudiée, regrette-t-il aujourd'hui. Il n'y a eu aucun débat public sur le sujet." C'est dans cette optique que l'adjoint au maire d'Agen, en charge des Finances, a lancé il y a plus de quinze jours une pétition sur internet (lire notre article). "Le feuilleton n'est pas terminé, insiste l'élu. Tant que la réforme n'est pas votée, il reste un espoir." Sa pétition en ligne continue. Ce soir, plus de 1.500 personnes l'ont signée.

Ils veulent plus
Jean-Louis Chauzy, lui aussi, plaide pour rapprochement avec Aquitaine, mais différemment. Le président du conseil économique social et environnemental régional (Ceser) demande en effet l'ajout d'Aquitaine à la nouvelle région Midi-Pyrénées / Languedoc-Roussillon. "Les évolutions sont souhaitables mais il faut aller encore plus loin. Notre approche territoriale est celle du Grand Sud-Ouest", indique-t-il, rappelant que "Midi-Pyrénées a des relations académiques et économiques avec Aquitaine". En effet, les deux régions sont liées par l'aéronautique, les pôles de compétitivité Aerospace Valley et Agri Sud-Ouest Innovation, ainsi que la marque Sud Ouest France. Jean-Louis Chauzy rencontrera d'ailleurs la semaine prochaine ses homologues de Languedoc-Roussillon et d'Aquitaine, pour en discuter. "Il faut un sursaut de courage", relève-t-il.

Un avis partagé par Alain Di Crescenzo, président de la chambre de commerce et d'industrie de Toulouse, qui se décrit lui-même comme "un fervent défenseur du bloc Sud-Ouest", regroupant Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. "Ce bloc pourra peser sur l'économie mondiale", se projette-t-il.

"En constituant un grand Sud-Ouest, nous serions la première région aéronautique et spatiale du monde, soutient également Philippe Robardey, président du Medef de Haute-Garonne. Nous serions une grande région agricole, nous aurions à la fois la montagne et l'accès à deux mers. Qui aurait mieux ?"

Les réactions risquent d'être nombreuses également au moment du choix du nom de la future région. Le débat ne fait que commencer !

Marie Vivent, Sophie Arutunian, Alexandre Léoty et Paul Périé
© photo DR

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