Réforme territoriale : avec qui va fusionner la région Midi-Pyrénées ?

La réforme territoriale est en marche et doit même être accélérée, François Hollande l'a rappelé mardi dernier. Alors que personne ne connaît la future carte de France "de 11 ou 12 régions" évoquée par le président, quels sont les espoirs, les hypothèses et les craintes des acteurs de Midi-Pyrénées ? La région va-t-elle vraiment fusionner avec Languedoc-Roussillon et voir ses contours modifiés ?
Redécoupage des régions : que va devenir Midi-Pyrénées?


Y a t-il trop de régions en France ? Oui répond François Hollande. "Une réforme majeure doit être portée. Il n'y a plus de temps à perdre", a affirmé le président de la République mardi dernier. "On verra qui sont les réformateurs et qui sont les conservateurs", a-t-il même lancé. La réforme territoriale aura donc bien lieu, et le chantier majeur sera le regroupement de régions, ainsi que l'engagement d'un débat sur la suppression des conseils départementaux. Scénario probable : une France à "11 ou 12 régions", selon François Hollande. Midi-Pyrénées pourrait alors "fusionner" avec Languedoc-Roussillon.

Le calendrier est le suivant : présentation d'un projet de loi ce mercredi 14 mai en Conseil des ministres, mise en place d'un groupe de travail "élus / gouvernement", débat au Parlement avant la fin de l'année et entrée en vigueur en 2017. D'ici là auront lieu les élections régionales. Un scrutin initialement prévu en 2015 que le président envisage de reporter à 2016 : "Ce serait intelligent de faire des élections régionales et départementales avec le nouveau découpage", a-t-il proposé. Une option qui satisfait Martin Malvy.

La réforme territoriale doit permettre de réduire le "millefeuille institutionnel" français. André Vallini, secrétaire d'État à la réforme territoriale, a fait le calcul : elle va permettre selon lui de réaliser entre 12 et 25 milliards d'euros d'économies par an.

Que va devenir Midi-Pyrénées ?

Hypothèse 1 : pas touche à Midi-Pyrénées
Même si Martin Malvy s'est toujours prononcé en faveur d'un redécoupage des régions, il reste prudent sur sa vision de Midi-Pyrénées, se gardant bien de préconiser une fusion avec ses voisines Aquitaine ou Languedoc-Roussillon. Non seulement "on n'en est pas là", affirme le président du Conseil régional qui ne "jette son dévolu sur personne", mais en plus, "Midi-Pyrénées est une grosse région, la plus grande de France en superficie. Nous avons la chance d'avoir une métropole forte avec des universités, un socle industriel, un pôle santé, un fort investissement en R&D et un aéroport. Ce qui nous manque ? 1 million d'habitants, pour pouvoir jouer dans la cour des grands aux côtés de Rhône-Alpes et Paca." Le président de région se prononce davantage en faveur du rassemblement des "petites" régions, "pour réaliser des économies de gestion". Une analyse partagée par Jean-Louis Chauzy qui insiste : "Notre superficie fait que nous ne sommes pas en situation d'assemblage avec nos voisins."

Hypothèse 2 : une fusion avec l'Aquitaine peu probable

Alors qu'une fusion de Midi-Pyrénées avec Languedoc-Roussillon est plus souvent évoquée, l'hypothèse d'un rapprochement avec Aquitaine serait-elle crédible ? Les deux régions, en pointe dans l'aéronautique, n'auraient-elles pas vocation à se rassembler ? Les échanges économiques Toulouse et Bordeaux sont déjà nombreux et solides et, pourtant, "même si cela peut sembler logique, ce n'est pas forcément utile", répond Agnès Paillard, président du pôle de compétitivité Aerospace Valley, présent dans les deux territoires. "La coopération fonctionne déjà, poursuit-elle. Il y a aujourd'hui des grosses régions puissantes et des petits poucets, ce n'est pas bon pour le dynamisme économique." Agnès Paillard s'attend à être consultée dans les semaines à venir. Elle plaidera alors davantage pour un ralliement entre les grandes régions et celles qui n'ont pas la taille critique pour rivaliser avec leurs voisines : "Aerospace Valley travaille avec certaines entreprises très dynamiques du domaine de l'aéronautique en Poitou-Charente, mais qui sont en périphérie des grands pôles. Une fusion avec Aquitaine pourrait enrichir le paysage."
Alain Rousset, le président du Conseil régional d'Aquitaine, se montre prudent. Il affirme dans Sud-Ouest qu' "il faut avoir à l'esprit que fusionner certains territoires entre eux coûtera cher. Il faudra reprendre les dettes, harmoniser les systèmes d'aides et de rémunération par le haut. Reprendre les deux Charentes coûterait ainsi 10 millions d'euros à l'Aquitaine."

Hypothèse 3 : une fusion avec Languedoc-Roussillon ne fait pas l'unanimité
L'hypothèse d'un rapprochement entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon est loin de satisfaire Christian Bourquin, le président de Languedoc-Roussillon. Contacté par nos confrères d'Objectif Languedoc-Roussillon, il ne décolère pas : "François Hollande a indiqué que cette réforme se ferait sur la base du volontariat. Or j'ai aussitôt dit mon refus donc elle ne se fera pas en Languedoc-Roussillon. C'est une idée éculée. C'est une vision paresseuse de dire que la puissance d'une région se définit par sa surface et sa population." "Pour être volontaire à fusionner, il faut être deux", sourit de son côté Martin Malvy, qui "regrette que les coopérations avec Languedoc-Roussillon ne soient pas aussi développées qu'avec l'Aquitaine", malgré la création en 2010 du pôle de compétitivité EAU qui associe Paca, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, et l'extension à Toulouse du pôle DERBI, basé à Perpignan. La future carte de France pourrait ainsi proposer une grande région Midi-Languedoc-Roussillon composée des départements suivants : Ariège, Aveyron, Gard, Haute-Garonne, Gers, Hérault, Lot, Lozère, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Tarn et Tarn-et-Garonne.

L'option ne sonne pas comme une évidence pour Jean Iglesis, président de l'UDI 31 : "Géographiquement, Montpellier est plus tournée vers Paca. Le Gard et particulièrement Nîmes, doivent être rattachés à Marseille. La Lozère devrait rejoindre la région Centre. Le Lot-et Garonne et la Corrèze devraient rejoindre Midi-Pyrénées, de même que l'Aude et les Pyrénées-Orientales. Quant à l'Aveyron, le plus pertinent serait de diviser le département en trois, entre Midi-Pyrénées, le Centre et Languedoc-Roussillon." Pour le politique, qui plaide depuis plusieurs années pour la réduction du nombre de régions : "il ne faut pas raisonner sur ce qui existe déjà. Il faut déstructurer le paysage actuel."

En admettant qu'une fusion s'opère entre Midi-Pyrénées et Languedoc Roussillon d'ici 2017, on n'échapperait alors pas à la question qui fâche : qui pour assurer le rôle de capitale régionale de la nouvelle région ? Toulouse ou Montpellier ?

Le rôle des métropoles
Plus largement, la question du rôle des métropoles dans la carte de France redessinée pose déjà question, alors que leur rôle et leurs compétences viennent d'être renforcés. Le député-maire de Neuilly, Jean-Christophe Fromantin, auteur en 2013 d'un rapport sur le redécoupage territorial, estime que les grandes métropoles de demain seront celles "positionnées dans l'hinterland d'un grand port maritime français", autrement dit celles donnant sur la mer. Mauvais point pour Toulouse.

Autre angle, autre carte : un redécoupage de la France basé sur l'histoire des territoires fait fusionner Midi-Pyrénées (sans le Tarn, la Haute-Garonne et l'Ariège) et Aquitaine pour reformer la "Guyenne et Gascogne". Capitale : Bordeaux.

Dans la définition du nouveau découpage des régions, les hypothèses ne font que commencer...

Sophie Arutunian
© photo Rémi Benoit

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