Civic Tech : ces Toulousains veulent faire bouger la démocratie

Deux startups du mouvement "Civic Tech" organisent à Toulouse un événement pour mettre en avant ceux qui cherchent à changer la politique grâce au numérique. Rencontre.
Jérémy Simonklein créateur de la startup Equivote, Lionel Bouzonville et Thomas Champion cofondateurs de Politizr.

La France prendra en décembre prochain la présidence du Partenariat pour un gouvernement ouvert, une initiative rassemblant 69 pays, ONG et citoyens et visant à "promouvoir la transparence de l'action publique et son ouverture à de nouvelles formes de consultation et de participation citoyenne". Pour l'occasion, à Toulouse, deux startups régionales (Politizr et Equivote) ont décidé d'organiser le 7 décembre prochain l'événement SoCivicTech pour donner la parole à ceux qui cherchent à changer la politique grâce au numérique.

Politizr : pour un débat de qualité sur internet

"Politizr, c'est l'anti-Twitter", lance Lionel Bouzonville. Cet ancien conseiller municipal de Foix (Ariège) a fondé avec Thomas Champion, un ami graphiste, et Maxime Forest, prof à Sciences Po, une plateforme permettant aux élus et anciens élus de débattre en ligne de sujets proposés par leurs concitoyens.

"Là où Twitter (qui restreint les messages à 140 caractères, NDLR) réduit souvent le débat politique au concours de la meilleure vanne, nous avons voulu lancer un site où les élus aient la place de détailler leur action pour faire naître un débat de qualité à partir des interrogations des habitants", expliquent les deux entrepreneurs.

Les commentaires doivent comporter 500 caractères minimum et les élus doivent s'inscrire à partir d'un scan de leur carte d'identité, pour éviter toute usurpation d'identité. "Ils pourront bientôt lancer des consultations citoyennes pour recueillir l'avis de leurs habitants sur un projet local. Ils pourront aussi disposer de statistiques sur les publications", détaille Lionel Bouzonville, qui cible en priorité les élus municipaux. "La France compte 1,6 million d'élus et d'anciens élus. 97 % d'entre eux sont des conseillers municipaux qui n'ont pas d'indemnité et donc pas de moyens pour les aider dans leur communication politique pour interagir avec les citoyens sur internet. Les conseillers, de même que les maires des petites communes rurales, sont à la recherche d'initiatives testées dans d'autres mairies et de liens directs avec d'autres maires."

Une version beta du site est testée depuis le mois de juin par 120 élus avant un lancement officiel à la fin de l'année. Parmi les premiers sujets de débat : "En Ariège, l'augmentation du prix de l'eau crée une inégalité de plus", "Primaires citoyennes : four ou succès ?", "Retour sur un référendum d'initiative locale"... Le site est gratuit pour les particuliers, les élus devront à terme débourser une centaine d'euros par an. Parmi les premiers inscrits figurent beaucoup de conseillers municipaux, de conseillers départementaux et régionaux, quelques maires et un député (Frédéric Lefebvre - LR). Malgré un nombre de participants encore limité, les fondateurs de la plateforme se félicitent de la vivacité des débats. "Sur la question du prix de l'eau en Ariège, un adjoint à la mairie a fourni une longue réponse détaillée à une habitante de Pamiers, de même que des élus d'opposition et d'autres maires. L'idée est de pouvoir interpeller des élus sur des questions très pratiques comme sur de grands projets. Nous avons aussi remarqué que, parmi les premiers inscrits, figurent quelques participants de la primaire citoyenne à l'élection présidentielle organisée par le site laprimaire.org. Leurs membres viennent sur Politizr pour débattre de toutes initiatives de démocratie participative."

Le site Politizr souhaite également héberger les billets de blog des élus et des membres de l'opposition, histoire de donner du grain à moudre aux débats.

MyOpenCity, un outil de démocratie

Autre initiative, cette fois à Toulouse. Depuis un an, la startup Equivote teste auprès de plusieurs communautés d'agglomération et des mairies du Lot-et-Garonne un service de référendum en ligne baptisé MyOpenCity. Le principe est simple : la collectivité achète l'utilisation du service (moins de 3 000 euros l'année pour une communauté d'agglomération) et peut inciter les habitants à s'exprimer sur les projets, organiser des référendums locaux ou encore diffuser en temps réel les assemblées plénières. De leur côté, les citoyens peuvent signaler des événements ou problèmes rencontrés au sein de la collectivité.

L'agglomération de Marmande (60 000 habitants) dans le Lot-et-Garonne, expérimente le dispositif depuis septembre 2015.

"La première consultation portait sur la piétonisation du centre-ville. Les habitants ont pu voter pour les rues qu'ils souhaitent sans voiture. Plus 2 800 personnes se sont connectées au site et la collectivité a également reçu des lettres avec des propositions" se réjouit Jérémy Simonklein, cofondateur de MyOpenCity.

Même si le nombre de participants est loin d'être suffisamment massif pour être représentatif, l'initiative a le mérite de doper la participation physique des habitants. "À Tonneins (commune de 9 000 habitants dans le Lot-et-Garonne), cette démarche a boosté la participation aux réunions de quartier. Il y avait 2 à 3 fois plus de monde qu'avant !", se félicite le jeune entrepreneur de 24 ans, diplômé d'Ingesup Toulouse.

Seul bémol, les collectivités ont fait remarquer que MyOpenCity entrait dans une démarche trop verticale, des élus vers les habitants. Depuis quelques jours, tout citoyen peut faire une proposition sur le site pour le conseil municipal de sa commune. "Si, au bout d'un mois, il a réussi à réunir au moins 200 soutiens, sa proposition sera transmise à la collectivité", poursuit Jérémy Simonklein. La startup Equivote a réalisé 12 000 euros de chiffre d'affaires en 2015 et espère voir l'activité décoller avec la nouvelle version du site.

Mis à part Equivote et Politizr, aucune autre startup n'a été créée pour le moment dans la Région Occitanie sur ce créneau des Civic Tech. Alors qu'à Paris ce mouvement est florissant, les entrepreneurs des deux sociétés espèrent à travers l'événement SoCivicTech enclencher une dynamique dans le Sud-Ouest.

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