La France tente de définir sa stratégie sur l'intelligence artificielle

La France est-elle en retard sur les États-Unis en termes d'intelligence artificielle? Pour beaucoup c'est une réalité, principalement due à un problème culturel. Une table ronde se tenait à Toulouse le 3 mars 2017 autour d'acteurs de la région qui se sont exprimés et ont exposé leurs points de vue sur l'intelligence artificielle dans le travail.
L'intelligence artificielle était au coeur de la table ronde qui se tenait vendredi 3 mars au Village by CA.

Sous impulsion d'Axelle Lemaire, ancienne secrétaire d'État en charge du Numérique et de l'innovation, a été lancé en janvier 2017 le projet France IA. Ce projet a pour but de définir une stratégie nationale concertée et de mettre en avant le potentiel de la France dans le domaine de l'intelligence artificielle (IA). Pour rappel, on appelle IA la science dont le but est de faire faire par une machine des tâches que l'homme accomplit en utilisant son cerveau. L'intelligence artificielle touche tous les domaines: agriculture, climat, IoT, industrie...
La priorité de France IA est d'identifier et de fédérer les acteurs du secteur, afin de favoriser la structuration d'une véritable filière industrielle de l'IA en France. Le projet d'Axelle Lemaire doit permettre de lancer des groupes de réflexion un peu partout en France. Ce fut le cas à Toulouse le 3 mars 2017 au Village by CA.

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USA et France

Parmi les invités, Ronny Fehling, le responsable des technologies de l'avionneur Airbus est d'abord revenu sur l'utilisation même de l'intelligence artificielle. "Ce n'est pas une façon de faire mieux que les humains, juste une façon différente de le faire". Il est venu conforter les propos introductifs de Nadia Pellefigue, venu représenter la région Occitanie. "L'intelligence artificielle n'est pas bonne ou mauvaise, elle se dessine en fonction de la façon dont elle est orientée", a déclaré la vice-présidente de la région.

­Les discussions se sont ensuite orientées vers les différences de fond entre la France et États-Unis sur la question de l'IA. Pour Ronny Fehling, la France et les États-Unis n'ont pas la même façon d'aborder l'intelligence artificielle. Selon lui "la France comme les États-Unis font partie des leaders mondiaux sur l'IA, mais aux États-Unis, on voit les problèmes comme des opportunités. Ce n'est pas le cas en France, cela relève d'un problème culturel". Ses propos sont confirmés par une étude publiée début 2016 par l'Observatoire B2V et l'Ifop. Dans cette étude, 65 % des Français sont inquiets vis-à-vis de l'intelligence artificielle, contre seulement 22 % des personnes aux États-Unis. Une différence de rapport à l'intelligence artificielle qui peut en partie expliquer l'avance évidente des sociétés américaines comme Google, Amazon, Facebook ou Apple (GAFA) par rapport aux entreprises françaises.

Louis-Claude Vrignaud, ‎directeur relations extérieures chez Continental, a une formule pour illustrer les différences en termes d'IA entre les États-Unis et l'Europe :

"Les GAFA et les États-Unis ressemblent à des champions du 100m là où les pays européens comme la France se rapproche du décathlonien, multidisciplinaire et endurant dans l'effort".

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Travail et formation

Autre thème crucial abordé par Ronny Fehling, la formation face aux changements apportés par l'intelligence artificielle.

"Le système scolaire français est en retard dans son attitude face à l'IA, la formation est essentielle, il faut former chaque année des centaines de personnes pour qu'elles deviennent data analyste" a déclaré le représentant d'Airbus.

Pour Marc Spigai de Thalès Alenia Space, "la formation des jeunes et la création de nouveaux métiers autour de l'intelligence artificielle est primordiale". Du coté de l'enseignement, à l'institut national de la recherche agronomique (Inra) Fréderick Garcia estime que "la France se positionne bien au niveau académique, reste inférieur aux États-Unis, mais conserve un niveau d'excellence. Cependant, la vague des données - qui est une bonne chose - pour l'IA ne doit pas laisser de côté le travail humain, les connaissances et les savoirs. Les grands enjeux sauront de savoir garder le lien avec le savoir humain et de ne pas tout laisser faire à une boîte noire".

Fréderick Garcia se montre par ailleurs optimiste quant aux changements apportés au travail :

"L'automatisation des métiers va engendrer une perte d'emploi massive dans certains domaines, mais ce n'est pas forcément un problème si on sait comment s'adapter pour créer de nouveaux emplois".

En effet, selon le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) moins de 10% des travailleurs vont voir leur métier disparaitre. Selon le COE la révolution numérique va surtout modifier les emplois et en créer d'autres. Les principaux métiers touchés seraient les métiers manuels comme agent d'entretien ou ouvrier.

Pour Philippe Pham d'Airbus Defence and Space, le constat est moins optimiste : "les métiers vont changer, l'automatisation arrive vite. La transition ne va pas être facile entre anciennes et nouvelles compétences". Ces propos se font l'écho de ceux du chirurgien et spécialiste des nouvelles technologies Laurent Alexandre. Il a, à maintes reprises, demandé aux communautés scientifiques et politiques de s'emparer de ce sujet, car selon lui dans un futur proche, 100% des travailleurs qui ne seront pas complémentaires de l'IA seront soit au chômage soit dans une position d'emploi aidé. "Si vous n'êtes pas complémentaire de l'IA, vous n'avez pas de travail. [...] en 2030, l'IA pourra remplacer tous les radiologues, car elle sera plus fiable qu'eux.", a déclaré fin janvier le fondateur du site Doctissimo devant le Sénat.

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