Imagerie satellite : des Toulousains mesurent la neige pour prévoir les stocks d'eau

Grâce à l'imagerie satellite, des scientifiques toulousains ont mis au point un système de mesure de l'épaisseur de la neige sur les reliefs montagneux. Cette méthode pourrait intéresser les secteurs de l'énergie et de l'agriculture, pour anticiper leurs besoins en eau.
Comment mesurer l'épaisseur de la neige dans les montagnes ?

Pour Monsieur Tout Le Monde, mesurer la hauteur de la neige en montagne, c'est intéressant pour prévoir un petit séjour de ski dans les Pyrénées. Pour les professionnels de l'agriculture et de l'énergie, l'intérêt est tout autre. Stock d'eau accumulé pendant l'hiver, la neige alimente les rivières et les nappes phréatiques en aval, au printemps lors de la fonte. Un apport indispensable pour irriguer les cultures et de faire tourner les centrales hydroélectriques.

"Si on peut évaluer le volume des stocks d'eau en mesurant la hauteur de neige, il est possible d'anticiper la gestion des centrales et de l'irrigation. Cela permet de prévoir d'éventuels déficits", explique Simon Gascoin, hydrologue au CNRS à Toulouse.

À l'heure actuelle, la hauteur de neige est mesurée grâce à un réseau de stations météorologiques : 30 en France, dont 10 réparties le long de la chaîne des Pyrénées. "C'est faible par rapport à la variabilité de l'enneigement dans les massifs montagneux", juge Simon Gascoin. Une autre technique utilise des outils de modélisation pour calculer les volumes des stocks d'eau, "mais, les précipitations sont mal connues au-delà de 1000 m d'altitude", explique le scientifique.

Une collaboration scientifique toulousaine

Si les États-Unis ont choisi l'observation par avion (un service mis en place par la Nasa) pour suivre très précisément la hauteur de la neige dans ses montagnes, la France pourrait à l'avenir miser sur les satellites. Une collaboration 100 % toulousaine entre les laboratoires Cesbio, Géode et Legos, ainsi que de la société toulousaine GéoFalco, a permis de mettre au point une méthode de mesure de la hauteur de neige grâce aux satellites Pléiades.

"C'est assez simple, explique Simon Gascoin, à l'initiative du projet au Cesbio. Un satellite prend des photos d'une zone de 20 km sur 20 km en très haute résolution et sous plusieurs angles de vue. Cela permet d'avoir une vision stéréoscopique et de créer un modèle 3D du relief. Cette opération est réalisée avant et après l'enneigement. Par soustraction, on obtient la hauteur de neige."

Déjà utilisée par les glaciologues pour mesurer la fonte des glaciers, cette méthode est utilisée pour la première fois dans cette optique. "À partir d'un mètre de hauteur de neige, les résultats sont bons, se félicite Simon Gascoin. Nous avons fait une campagne de sonde, manuelle, dans les Pyrénées ariégeoises pour vérifier les résultats obtenus par imagerie satellite. La différence entre les résultats fournis par les deux méthodes est faible."

Une mesure par drone opérée par la société GéoFalco a également été réalisée pour compléter l'étude. "Le drone est plus précis que le satellite, mais il est limité par son autonomie de vol, compare Simon Gascoin. Avec Pléiades, on peut photographier n'importe quelle zone de la planète sans bouger d'ici."

Cette méthode pourrait en effet être utilisée dans des pays ne disposant pas de réseau météorologique dense. "Au Chili par exemple, la Cordillère monte à plus de 6 000 m mais les dernières mesures sont à 3000 m d'altitude", précise Simon Gascoin. Même s'il pense pouvoir rendre son système opérationnel rapidement, le scientifique compte poursuivre ses observations quelques années. "Nous sommes encore dans le domaine de la recherche, conclut-il. Les satellites Pléiades sont très sollicités pour d'autres applications."

Présentée à EDF, cette méthode intéresse l'énergéticien mais pas encore au point de remplacer ses 35 nivomètres à rayonnement cosmique (NRC) répartis sur l'ensemble du territoire. "Les NRC nous permettent de mesurer la quantité d'eau contenue dans les volumes de neige, ce qui n'est pas possible avec les satellites", explique la direction d'EDF. Le groupe dispose de deux centres météorologiques, à Grenoble et Toulouse, pour suivre les aléas du climat et anticiper les besoins en eau pour ses barrages, mais aussi pour le refroidissement des centrales nucléaires.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.