Le "Guide", un laboratoire de test pour les applications spatiales unique en France

Centre d'excellence unique en France, le laboratoire Guide teste et homologue les applications de géolocalisation par satellite qui feront partie du quotidien dans quelques années. Mis en place en 2012 à Toulouse par un groupement d'industriels et d'acteurs du domaine spatial, ce laboratoire a vocation à concurrencer ses homologues allemands.
Xavier Leblan, le directeur du laboratoire Guide

À la pointe de la technologie dans le domaine de la géolocalisation satellitaire avec les programmes Egnos et Galileo, l'Europe, et la France en particulier, sont à la traine en ce qui concerne les applications spatiales.

"Aujourd'hui, le marché du GNSS (système global de navigation satellitaire) est institutionnel, mais le Cnes et l'Esa semblent vouloir prendre des mesures incitatives et développer des applications avancées", constate Xavier Leblan, spécialiste du secteur.

"Les opportunités dans le ferroviaire se chiffreraient en centaines de millions d'euros. En termes de service, les compagnies aériennes vont ouvrir de nouvelles lignes interrégionales sur des aéroports secondaires en s'appuyant sur des procédures d'approche GNSS. Pour le routier, une association comme Automotech, par exemple, prépare le véhicule autonome qui intégrera des fonctions GNSS avancées."

Fort de ce constat, un groupement d'industriels et d'acteurs du domaine spatial, comme Airbus Defence & Space, Telespazio, Thales Alenia Space, le Cnes et Aerospace Valley entre autres, ont mis en place mi-2010 un centre d'excellence dédié à ce secteur.

Soutenu par le Cnes, labellisé par le pôle Aerospace Valley et conduit par Marc Pollina, président de M3 Systems, le Guide (GNSS Usage Innovation and Developpement of Excellence) est un centre d'expertise et d'essais en géolocalisation par satellite, hébergé dans les locaux de la pépinière de Toulouse Métropole.

Sa mission : mettre en commun les expertises détenues par chacun des membres et mutualiser un matériel très onéreux. Une centrale inertielle (un instrument qui sert à déterminer l'orientation et la vitesse d'un objet - voir photo) vaut ainsi 100 000 euros.

"Guide offre un large spectre de tests destinés à valider les performances GNSS des équipements les plus pointus, soit par simulation en laboratoire, soit en conditions réelles, c'est-à-dire en milieu urbain, routier, aérien, maritime et ferroviaire, explique Xavier Leblan, directeur du laboratoire depuis juillet 2012. Nous testons la précision, la fiabilité et l'accessibilité des signaux."

Réduire le coût des tests

Pour mener à bien ces tests, le laboratoire possède une voiture "équipée de 150 000 euros de matériel". Avec le soutien de ses membres, il dispose aussi d'un drone, d'un hélicoptère, d'un avion léger et d'une zone de très haute précision pour des mesures centimétriques.

Ces essais en conditions réelles coûtant très cher - l'utilisation d'un train coûte par exemple 50 000 euros - le laboratoire a mis au point des bancs de simulation. Cette méthode moins onéreuse rend les essais plus accessibles, notamment pour les petites entreprises.

"Elles sont habituellement écartées des processus d'essais à cause des coûts de mise en œuvre de ces opérations, remarque Xavier Leblan. Nos services ont vocation à accompagner et accélérer les processus de R&D des PME."

En trois ans d'existence, le laboratoire a participé à de nombreux projets. En 2013, il a été missionnée par Ecomouv (la société qui été chargée de récolter les recettes de l'éco-taxe) pour réaliser des essais d'homologation des éléments embarqués dans les portiques. "Le gouvernement voulait s'assurer que les usagers ne s'exposeraient pas à des taxations à tort. Le risque politique aurait été sérieux", glisse Xavier Leblan.

Autre projet auquel collabore le laboratoire : Path 4 flight, un projet piloté par l'entreprise de Castres CGX Aero. "Il s'agit de générer automatiquement la trajectoire de vol pour que les hélicoptères de secours, par exemple, se rendent plus vite sur les lieux d'un accident", explique Xavier Leblan.

En prenant automatiquement en compte les zones interdites au vol, les conditions météo, le relief et la position des autres aéronefs, ce système pourrait réduire de 30 à 5 minutes le délai de préparation des vols. "C'est l'espace aérien du futur qui se dessine", résume le scientifique.

Le GNSS, une mine d'or

En 2013, année faste, le contrat avec Ecomouv a permis au laboratoire de réaliser un chiffre d'affaires de 1,3 million d'euros. L'annulation du projet a fait refluer le CA en 2014 mais, selon les prévisions, celui-ci devrait s'établir autour de 500 000 euros cette année.

Aujourd'hui, le marché des essais en géolocalisation reste soutenu par l'État, via le Cnes, la DGA (direction générale de l'armement), l'Esa (agence européenne de l'espace) et la GSA (agence européenne du GNSS). Pour autant, le centre d'essai a dépassé ses objectifs initiaux en 3 ans d'existence. Initialement labo interne à l'usage de ses membres, il s'est ouvert au point de devenir un centre de référence en France.

"Les autres organisations en France sont des laboratoires nationaux avec des missions de recherche. Nous avons donc l'ambition d'être le guichet unique pour les industriels, affirme le directeur du laboratoire. Si nous n'existions pas, il faudrait aller en Allemagne où des laboratoires sont en place depuis 10 ans."

Aux États-Unis, les retombées économiques du secteur GNSS sont estimées à 68 milliards de dollars selon une étude récente. Pour exploiter cette mine d'or potentielle, les industriels européens devront faire de plus en plus appel à des laboratoires tels que le Guide, en particulier avec l'arrivée des normes internationales.

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