Toulouse innove contre le gaspillage alimentaire

Application pour gérer son frigo, fabrication de bières à partir d'invendus de pain, confection de confitures avec des légumes mis au rebut par la grande distribution... Le gaspillage alimentaire est un secteur porteur qui suscite de plus en plus d'initiatives au sein des startups et des grands groupes.
Des Toulousains lancent leur activité pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

En France, chaque année, 16 milliards d'euros de nourriture sont jetés à la poubelle selon une récente étude de l'Ademe... Soit 10 millions de tonnes d'aliments ! À Toulouse, des entrepreneurs se mobilisent pour limiter ce gaspillage alimentaire. Revue de détail de quelques initiatives.

  • Les Repêchés mignons confectionne des confitures à partir de légumes mis au rebut

Bénévole au sein de l'association Discosoupe, Céline Jouanin a eu l'idée il y a deux ans d'utiliser les fruits et légumes mis au rebut par les supermarchés pour confectionner des confitures, baptisées les Repêchés mignons. La jeune femme s'amuse à tester des mélanges détonnants. Elle vend ainsi de la confiture courgette-banane, tomate-menthe, melon-vanille...En 2016, 10 000 pots de repêchés mignons ont ainsi été confectionnés via un chantier d'insertion à Toulouse. Les pots sont commercialisés dans une dizaine de points de vente de la Ville Rose, principalement des épiceries fines ou le magasin en vrac Ceci & cela.

La fondatrice des Repêchés mignons aimerait dans les prochaines années diversifier ses fournisseurs. "Actuellement, nous récupérons les fruits et les légumes auprès de trois supermarchés mais j'aimerais à terme travailler avec des producteurs locaux", explique Céline Jouanin. Pour elle, le succès de son concept, s'inscrit "dans une envie des citoyens de décroissance et de consommer mieux, les gens sont aussi davantage sensibilisés au gaspillage alimentaire".

Repeches Mignons

Céline Jouanin vend des pots de confitures à partir de fruits et de légumes mis au rebut par les supermarchés (Crédit : Rémi Benoit).

  • La brasserie L'Oustal fabrique des bières avec des invendus de pain grillé

Titulaire d'une thèse en chimie environnementale, Adrien Claustres a ouvert à l'automne 2016 une boutique à Baziège (Haute-Garonne) où il fabrique des bières qui contiennent un ingrédient atypique : du pain grillé. L'autre particularité est que le brasseur utilise du pain invendu récupéré auprès de trois boulangeries voisines. Un an après le lancement de ce concept, le succès est au rendez-vous. "Je produis 1500 litres de bières par mois dont un tiers avec du pain grillé", avance Adrien Claustres. Et l'ancien doctorant réfléchit déjà à réutiliser d'autres aliments : "J'aimerais bien intégrer dans la bière des fruits ou des légumes. J'ai essayé de concocter une bière à la banane mais les tests n'étaient pas très concluants", glisse-t-il.

En revanche, le fondateur de la brasserie L'Oustal aimerait aller plus loin dans sa démarche contre le gaspillage en recyclant les déchets issus de la production de bière au sein d'Organic' Vallée, zone d'agroactivités à Belesta-en-Lauragais, spécialisée dans l'économie circulaire. "Ce sont principales des céréales concassées qui pourraient être utilisées pour faire pousser des champignons", précise Adrien Claustres.

Brasserie de l'Oustal

La brasserie L'Oustal fabrique des bières avec du pain grillé invendu (Crédit : L'Oustal).

  • So Appli, une application toulousaine qui alerte des dates de péremption

Savoir en permanence ce qui se trouve dans son frigo? C'est désormais possible grâce à l'application So Appli. Développé par Valérie Aubert, ancienne commerciale et mère active lassée de jeter les restes oubliés ou de racheter les mêmes denrées en plusieurs exemplaires, l'outil est breveté depuis le mois de juin. "So Appli est une application très intuitive. Il suffit de scanner le code-barres des produits que l'on achète au supermarché - ou de les rentrer manuellement pour les fruits, légumes - et de les classer dans les catégories frigo, congélateur ou garde-manger, détaille Valérie Aubert. Ensuite, on coche les produits utilisés en précisant s'ils ont été 'consommés' ou 'gaspillés', pour que les aliments s'ajoutent automatiquement à la liste des courses". D'après une estimation réalisée à partir de la trentaine d'utilisateurs de la version beta de l'application, une famille de quatre personnes économiserait ainsi entre 30 et 50 euros de nourriture par mois, même si le message principal de sa créatrice reste le "consommer mieux".

So appli

Le lancement officiel de l'application So Appli a eu lieu le 20 septembre à La Mêlée numérique. Crédits: So Appli

Dans la version 2.0 de So Appli, les dates de péremption des denrées seront automatiquement calculées et il sera possible de partager stock et liste de courses avec les membres de sa famille. Labellisé "Smartcity" et hébergé par la pépinière de Toulouse Métropole, le service est proposé gratuitement sur tous les App stores. Pour son business model, l'application officiellement lancée le 20 septembre à La Mêlée numérique, est donc en recherche de partenaires dans l'industrie agro-alimentaire: "Nous ne mettrons pas de publicités mais si par exemple, avec Leclerc Drive, vous pouvez envoyer directement votre liste de course, vous serez plus enclins à consommer auprès de cette enseigne, souligne Valérie Aubert. Ce sera du gagnant-gagnant".

  • Le Cnes livre les repas non consommés à des associations

Depuis janvier 2016, le Centre national d'études spatiales (Cnes) de Toulouse livre les repas non consommés de son restaurant d'entreprise. "Nous avons une politique anti-gaspi mais malgré nos efforts, il est difficile de viser chaque jour les quantités justes avec 1800 repas distribués quotidiennement", explique Frédéric Debauchez, responsable de l'Association pour la gestion du restaurant du Centre spatial de Toulouse (AGR-CST). "Nous avons donc investi dans un véhicule électrique et des conteneurs réfrigérants pour livrer la nourriture non consommée à des associations. Les mardis et vendredis, un membre de notre équipe de 32 personnes effectue cette livraison quand il reste des plats".

cnes

Le Cnes livre ses repas à l'association toulousaine Cité de la Madeleine qui gère plusieurs structures d'accueil de personnes en grande difficulté. Crédits: CNES/Nicolas Tronquart, 2017

Grâce à ce système, l'année dernière, 2320 entrées, 6000 plats de poisson ou viande, 4800 accompagnements et 2100 desserts ont été redistribués. À ce jour, le Cnes possède un partenariat avec l'association toulousaine Cité de la Madeleine qui gère plusieurs structures d'accueil de personnes en grande difficulté. En ce moment, ce sont les centres d'accueil pour SDF "Halte de nuit" et pour femmes isolées de la Vélane qui en bénéficient. "Créer de nouveaux partenariats n'est pas simple car beaucoup d'associations ont besoin de savoir à l'avance la quantité exacte de nourriture livrée, ce que nous ne pouvons pas prévoir, précise Frédéric Debauchez. Par ailleurs, nous ne pouvons pas réaliser de circuit géographique trop grand sur Toulouse ou trop éloigné du Cnes".

Cependant, même si les nouveaux partenariats sont difficiles à développer, l'initiative inspire déjà d'autres organismes. Frédéric Debauchez a notamment été contacté par un ingénieur d'Airbus Saint-Nazaire, pour des renseignements sur les démarches administratives à effectuer afin d'obtenir la dérogation à l'agrément sanitaire. Une fois doté de cette autorisation à livrer de la nourriture à l'extérieur, n'importe quel restaurant d'entreprise volontaire a ainsi la possibilité de faire des dons.

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