Le secteur spatial se sent-il à l'étroit dans l'espace ? Selon la société de conseil en innovation Alcimed, plusieurs acteurs majeurs du secteur spatial souhaiteraient redescendre sur terre et apporter leur expertise en matière de télécommunication et de géolocalisation dans le secteur de l'automobile, notamment pour la voiture connectée.

Un consortium Elaastic (European Location As A Service Targeting International), composé entre autres de Thales et Telespazio, a par exemple cherché à améliorer la précision de la géolocalisation dans les canyons urbains (rues étroites et entourées de hauts immeubles).

"En combinant données satellitaires, wifi et cellulaires, la technologie développée par le consortium permet d'affiner la précision de la géolocalisation, ce qui pourrait intéresser les constructeurs, les équipementiers et les acteurs de l'aftermarket dans le domaine de la voiture connectée. Cela permettait notamment d'analyser plus finement les comportements des flottes de véhicules ou d'améliorer la réactivité des véhicules d'intervention", constate Géraldine Gascons-Viladomat, directrice d'Alcimed Toulouse.

Outre leurs expertises, les acteurs du spatial cherchent également à transposer leurs propres technologies - au coût de développement élevé - pour des applications automobiles. "Des opportunités ont été identifiées dans l'automobile, qui reste à l'écoute voire à la recherche des technologies spatiales pour optimiser les performances", note explique Géraldine Gascons-Viladomat.

Dans ce contexte, Alcimed a également travaillé sur la valorisation d'une technologie de traitement d'images utilisée par les engins spatiaux pour naviguer dans l'espace. "Les technologies spatiales sont très fiables et peu gourmandes en puissance de calcul. Cela les rend pertinentes pour répondre à des applications dans l'automobile", précise Rémy Dangla, consultant pour Alcimed. Des équipementiers comme Continental ou Valeo peuvent s'y intéresser." C'est ainsi que le groupe Safran coopère avec Valeo dans la voiture autonome.

Qu'en pensent les premiers intéressés ?

À Toulouse, EasyMile conçoit des navettes autonomes et électriques dédiées au transport en commun. Des véhicules dont la RATP vient de commander deux exemplaires.

"Il y a des approches méthodologiques similaires entre le spatial et l'automobile car nous utilisons des technologies dérivées du spatial pour géolocaliser avec précision nos véhicules et pour nous assurer de la fiabilité des données, remarque Luc Barthelemy, responsable produit à EasyMile. Cependant, les solutions mises en place sont différentes pour des questions de coûts."

"Les  satellites GNSS vont nous permettre d'améliorer la précision de la géolocalisation des véhicules autonomes au niveau centimétrique mais cela ne sera pas suffisant. Nous devons fusionner les capteurs et les technologies embarquées, estime quant à lui Jean-Luc Maté, responsable de la  stratégie et innovation à Continental Automotive, en charge du segment aérospatial à Continental Engineering Service.

Si le spatial s'intéresse à l'automobile, l'inverse est aussi vrai. "Les constellations de satellites peuvent utiliser les  technologies de l'électronique automobile", soutient Jean-Luc Maté. Des discussions ont été engagées à ce sujet dernièrement entre Continental Engineering Services et les deux plus importants constructeurs toulousains de satellites, Thales Alenia Space et Airbus Defence & Space.

Si le marché spatial reste encore anecdotique aujourd'hui pour Continental, Jean Luc Maté insiste sur l'aspect stratégique d'une coopération entre les deux secteurs : "Nous pouvons envisager pour le "new space" un nouveau savoir-faire mêlant les compétences du spatial et les capacités de production industrielle de l'électronique professionnelle et de la mécanique automobile de précision."