Path 4 Flight, un outil au service des pilotes d'hélico du Samu

Permettre aux hélicoptères du Samu d'intervenir plus rapidement sur les sinistres et de sécuriser leurs vols, tels sont les objectifs du programme Path for flight, développé par l'entreprise castraise CGX Aéro et ses partenaires. L'outil doit générer automatiquement des trajectoires de vols pour assister les pilotes. Lancé fin 2013, le projet, financé par le Fonds unique interministériel, a été présenté le 2 juillet, dans sa première version. Il sera opérationnel et commercialisé à la fin 2016.
Un hélicoptère de la sécurité civile de la région Paca

Héliport du Samu. Le téléphone sonne. De toute urgence, il faut partir en mission. Sur son ordinateur, le pilote tape la destination. À l'écran, une carte de la région apparaît et des trajectoires de vols sont calculées en temps réel en fonction de la météo, des espaces aériens, de la géographie et des caractéristiques techniques de l'appareil utilisé pour le vol. En quelques minutes, une ligne brisée rouge se matérialise sur la carte. D'après le logiciel d'aide à la décision, c'est la meilleure option pour se rendre sur le lieu de la mission. L'hélicoptère décolle dans la nuit tombante. Arrivé sur zone, le pilote enclenche une batterie de systèmes embarqués. Bon réflexe, car le capteur infrarouge dévoile une grue de chantier à proximité du lieu d'atterrissage. Un élément inconnu jusqu'à présent que l'équipage va pourvoir prendre en compte pour accomplir sa mission.

Un outil au service du SAMU

Ce scénario, imaginaire à l'heure actuelle, pourrait devenir une réalité fin 2016, grâce au projet Path 4 Flight, trajectoire de vol, en français. Lancé en décembre 2013 à l'initiative de l'entreprise castraise CGX Aéro, ce programme doit permettre aux hélicoptères du Samu d'intervenir plus rapidement sur les sinistres et de sécuriser les vols.

D'après des études menées sur les opérations des hélicoptères sanitaires en France, les conditions météorologiques du vol à vue ne sont pas toujours réunies, surtout en période hivernale et de nuit, ce qui limite les capacités d'interventions du Samu.

Pour améliorer cette situation, le projet P4F vise à mettre à disposition des équipages des "données météo spécifiques de qualité et actualisées, et des trajectoires de vol par satellite afin de mieux anticiper les conditions de vol à vue".

"Il s'agit de proposer un outil, utilisé au sol et embarqué, capable de générer automatiquement les trajectoires de vol des hélicoptères d'évacuation sanitaire, décrit Éric Poisson, responsable des ventes et de la communication à CGX Aéro.

L'objectif est d'améliorer la disponibilité des hélicoptères en accélérant la préparation des missions et en permettant d'adapter les trajectoires presque en temps réel. Cela constituera pour les pilotes une aide à la décision lors de la préparation de mission et dans le cadre du vol à vue."

Outil multi-fonction, "P4F" devrait à la fois :

  • Fusionner les informations concernant les contraintes réglementaires, aéronautiques, géographiques, environnementales et météorologiques.
  • Améliorer les phases de décollage et d'atterrissage grâce à des capteurs visualisant des obstacles non répertoriés.
  • Analyser les gains de productivité (nuisances, consommation, cycle turbine, et bilan carbone) pour optimiser l'efficacité opérationnelle des appareils.

Qu'en pensent les professionnels ?

Aujourd'hui, les pilotes du Samu ne préparent pas leurs trajectoires de vols avant leurs missions.

"Nous partons en moins de deux minutes, rappelle Gilles Cohen, pilote d'hélicoptère du Samu à Toulouse. Les pilotes connaissent leur région et pilotent à vue. Chacun se débrouille. Moi par exemple, j'ai une tablette avec un GPS pour déterminer les trajectoires mais cela ne prend pas en compte la météo ou les zones de vol interdit."

Vice-président du syndicat du personnel naviguant de l'aviation civile (SNPNAC), Fabrice Chrétien fait le même constat concernant les équipages de la sécurité civile (sapeurs-pompiers, gendarmes, etc.) :

"Ils n'ont pas le temps d'envoyer un plan de vol via le Bria (Organisme de centralisation des plans de vols) lorsqu'ils partent en mission. Ils se concentrent sur les facteurs importants qui détermineront la réussite de la mission (météo, gestion des partenaires, gestion du kérosène, environnement aéronautique) afin d'établir un schéma d'action et utilisent le logiciel 'Google earth' pour visualiser la zone d'intervention et les obstacles qui l'entourent".

Également secrétaire général du SNPNAC pour les hélicoptères de la sécurité civile, Fabrice Chrétien considère d'un bon œil le projet P4F.

"Tel qu'il est décrit, ce dispositif peut apporter une réelle plus-value quant à la prise de décision du commandant de bord. Il devrait permettre d'apporter un gain en termes d'optimisation de trajectoires et de sécurité."

Un avis partagé avec enthousiasme par Gilles Cohen : "Ce serait formidable d'avoir un logiciel qui calcule les trajectoires en moins de deux minutes, tout en centralisant la météo, mais aussi les notam ("notice to airmen", messages aux navigants regroupant des informations sur les infrastructures au sol, NDLR), le parcours des avions de chasse, etc. Avoir cela sur une tablette dans la cabine, cela remplacerait une sacoche de pleine de documentations pas faciles à utiliser en vol."

 "Un marché colossal"

Financé à hauteur de 3 millions d'euros dans le cadre du 16e Fonds unique interministériel, P4F a été présenté pour la première fois jeudi 2 juillet à ses partenaires publics (l'Union européenne, BPIFrance, les conseils régionaux de Midi-Pyrénées et de Paca, le Conseil départemental du Tarn et Castres-Mazamet Technopôle) qui financent le projet à 45 %.

"Ce P4F de première génération prend en compte les données géographiques et les caractéristiques techniques des appareils, précise Éric Poisson. La météo et les systèmes embarqués seront pris en compte dans l'outil de 2e génération. La fusion de toutes les données aura lieu en juin prochain."

La commercialisation de l'outil est prévue dans ses deux versions pour la fin 2016 et devrait générer, selon les estimations de CGX Aéro, un chiffre d'affaires de 500 000 euros en 2017. Après le Samu, l'entreprise compte proposer son outil à d'autres acteurs de l'évacuation sanitaire comme la sécurité civile (sapeurs-pompiers, gendarmes, etc.).

À plus long terme, c'est un marché "au potentiel colossal" qui s'ouvre à CGX Aéro et à ses partenaires. Le projet réunit en effet des laboratoires nationaux de recherche tels que l'Enac, l'Onera et Gredeg, ainsi que des entreprises comme Latécoère, Atmosphère, Inaer France et Guide. Outre les hélicoptères, P4F pourrait intéresser les secteurs de l'aviation légère et des drones.

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