Labège a-t-elle encore assez d'atouts pour attirer chefs d'entreprise et investisseurs ?

Effets de la densification sur les prix de fonciers, discussions sans fin à propos de l'arrivée (ou pas) du métro... Autant de sujets qui pourraient peser demain sur la construction de nouveaux bureaux à Labège. Enquête.
Zone commerciale de Carrefour à Labège

Labège, son futur quartier Innométro et son campus numérique de 100 000 m2... promis par les élus du Sicoval. Si la commune du sud-est toulousain rêve de se muer en un pôle économique attractif, elle doit pour l'heure composer avec la plus ancienne zone d'immobilier tertiaire de l'agglomération.

"Les premiers immeubles de bureaux ont été construits à Labège il y a trente ans", rappelle Pascale Cieutat, directrice de l'agence DTZ Toulouse et vice-présidente de l'Observatoire toulousain de l'immobilier d'entreprise OTIE. "Ces immeubles ne sont plus du tout en phase avec les standards attendus aujourd'hui par les chefs d'entreprise et ils ont du mal à se louer. Selon les derniers chiffres de notre observatoire, on compte d'ailleurs entre 33 000 et 35 000 m2 de bureaux vacants à Labège."

Alain Lacour, PDG de Lyra Network, installé de longue date à Labège et depuis trois ans dans un nouveau siège social qu'il a fait construire, vient d'en faire l'amère expérience.

"Notre entreprise en forte croissance avait besoin de s'agrandir et j'ai fait le choix il y a quelques années de rester à Labège pour construire mon siège social de plus de 2000 m2. J'ai investi 6 millions d'euros sur mes deniers personnels dans ce projet, et nous y sommes depuis trois ans. Mais trois ans, c'est aussi le temps que j'ai mis pour arriver à revendre mon premier siège social de 600 m2 situé lui aussi à Labège. Trois ans de vacance qui ont pesé lourd et je peux vous dire que les entreprises aujourd'hui ne visent pas Labège pour s'installer", affirme-t-il.

En cause, notamment, des différences de loyers trop minimes entre les constructions neuves et ces immeubles de seconde main nécessitant des travaux de réhabilitation. "On voit d'ailleurs à Labège des loyers neufs proposés à 145 euros/m2, contre 90 à 100 euros/m2 pour de l'ancien avec des travaux. Les preneurs n'hésitent pas", observe Pascale Cieutat.

Thales ne renoncera pas à s'installer à Labège

Ces dernières semaines, après les ultimes rebondissements liés au prolongement de la ligne B du métro (PLB), Alain Lacour comme Ludovic Le Moan, le PDG de Sigfox sont montés au créneau pour dénoncer des "politiques girouettes" et des "guerres politiques intestines" qui nuisent au développement économique du territoire. Certaines rumeurs évoquaient même la possibilité pour le groupe Thales de renoncer à s'installer dans son futur siège social actuellement en construction à Labège.

Le groupe n'a officiellement pas réagi aux dernières annonces concernant le métro mais, selon Philippe Chrétien, secrétaire du comité d'entreprise de la société Thales Services et délégué syndical CFDT (pourtant vivement opposé au déménagement de son groupe), une annulation du projet immobilier est peu probable. "À ce stade, Thales a investi beaucoup trop d'argent dans ce projet et ne peut plus faire machine arrière. Nous devrions bien emménager à Labège en fin d'année", regrette-t-il.

Un emménagement qui ravit l'investisseur Midi2i (filiale de la Caisse d'Épargne). Il porte les 17,5 millions d'euros de travaux de ce bâtiment de 10 000 m2 construit par Pitch Promotion. "Tout est en ordre de marche pour accueillir le preneur. La question du métro ne remet absolument pas en question l'engagement de Thales", affirme Pierre Cabrol, le PDG de Midi2i.

En revanche, la deuxième tranche de ce programme qui comptera à terme un deuxième bâtiment de 10 000 m2, n'est pas lancée à ce jour. "Nous avons des contacts, mais rien n'est fait", confirme Pierre Cabrol, qui veut pourtant rester optimiste quant à l'avenir de Labège. "Midi2i investira sans doute dans d'autres opérations à Labège, car il y a ici de grands faiseurs et je ne suis pas forcément très inquiet sur la question du métro. Pour moi, cette décision (de ne pas prolonger la ligne B, NDLR) n'est pas définitive."

À Labège, la densification pèse sur les prix

Si la question du métro est toujours en suspens, une autre réalité préoccupe à ce stade les chefs d'entreprise à Labège : l'augmentation des prix de fonciers.

"Nous réfléchissons à construire une extension de 2 000 m2 à côté de notre siège, mais l'envolée des prix du foncier a été telle depuis notre dernière opération que nous nous posons aujourd'hui la question de rester ici, confie Alain Lacour, qui réfléchit en investisseur. Si le métro ne vient finalement pas jusque là, je louerai ou revendrai mon bâtiment moins facilement si c'est un jour d'actualité."

Une augmentation de prix également constatée par les experts de l'OTIE. "À Labège, les effets de la densification se répercutent sur les prix du foncier, même si les prix/m2 shon sont restés stables. Les élus du Sicoval souhaitent densifier et imposent donc des constructions beaucoup plus importantes, mais ils doivent rester prudents", estime Pascale Cieutat.

La société d'Alain Lacour, qui compte 120 de ses 160 salariés à Labège, pourrait donc continuer de se déployer loin du Sud-Ouest. "Nous sommes capables de nous structurer en pôle et, désormais, rien ne nous oblige à rester ici. D'ailleurs, je suis régulièrement sollicité par d'autres régions de France pour venir m'implanter chez eux et je regarde avec beaucoup d'intérêt la métropole lilloise qui réserve un accueil sur mesure aux entreprises du digital."

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