Télé Toulouse (TLT) : 27 ans d'une histoire contrariée

Ce vendredi 3 juillet 2015 pourrait marquer la fin de la chaîne TLT, née en 1988 sous l'impulsion de Dominique Baudis. La chaîne, qui n'arrive pas à rembourser ses dettes, devrait être placée en liquidation judiciaire. Retour sur les grandes dates qui ont marqué l'histoire (mouvementée) d'une des premières télés locales de France.

1988 : création de TLT par Dominique Baudis, alors maire de Toulouse et par Robert Piétri, un ancien de FR3, qui en prend la direction. À l'origine, TLT est co-contrôlée par la Ville de Toulouse (via la société d'économie mixte CTV) et le groupe Vivendi, qui se désengagera en 2002. Au début, les studios de TLT sont installés dans le quartier Compans-Caffarelli, place Alfonse Jourdain.

TLT

--> Immeuble TLT en fin de construction place Alfonse Jourdain, quartier Compans-Caffarelli. 3 décembre 1987. © Daniel Molinier, Direction de la communication, ville de Toulouse, négatif NB. Archives municipales de Toulouse, 15 Fi 3963.

Années 90 : TLT se fait connaître et met en lumière les humoristes des Chevaliers du Fiel. Le journaliste Philippe Bes imprime sa marque en organisant des débats réputés "animés". TLT compte alors une grosse cinquantaine de salariés.

2001 : L'affaire AZF marque à jamais les équipes de TLT. La chaîne informe les Toulousains sur l'explosion de l'usine chimique en direct, presque toute la journée. Elle devient également un relais pour les personnes qui sont sans nouvelles de leurs proches. Sans la concurrence des chaînes d'infos en continu, TLT devient une source incontournable d'informations sur la catastrophe.

AZF catastrophe

--> Le 21 septembre 2001, TLT est l'un des premiers médias présents sur le site AZF, soufflé par une explosion qui fait 31 morts

2002 : C'est le début des difficultés pour TLT, qui change d'actionnariat. Vivendi se désengage et laisse la place à de nouveaux actionnaires : le groupe Lagardère, La Dépêche du Midi, la Caisse d'Épargne Midi-Pyrénées (20 % chacun) et Sud Communication (groupe Pierre Fabre, 14 %). Un nouveau conseil d'administration est mis en place et Pierre Boucaud est nommé PDG en remplacement de Robert Piétri, démissionnaire. Le résultat net fait déjà apparaître une perte de 1,8 million d'euros.

2003 : Sous l'impulsion de Lagardère, les studios déménagent à l'Arche Marengo, davantage en vue, en plein centre-ville. La chaîne profite du déménagement pour renouveler son matériel et passer aux caméras numériques. Le début des années 2000 marque aussi le début de La Matinale, qui engendre des frais considérables pour produire les contenus nécessaires.

2005 : Pierre Boucaud quitte TLT pour créer LCM à Marseille avec Philippe Bes. Hervé Schlosser (aujourd'hui PDG de France Pari et vice-président de l'IoT Valley) devient directeur général de TLT.

La même année est lancée en France la TNT. La chaîne toulousaine, qui vivait jusque là sur le canal 7, passe à la chaîne 31 et perd en visibilité. Avec le développement de l'offre TNT, TLT se retrouve aujourd'hui entre les chaînes 200 et 300 selon les "box" utilisées par les téléspectateurs. Un sérieux manque de communication auprès du public fait alors perdre de l'audience à la chaîne.

Novembre 2008 : TLT est déclarée en cessation de paiement auprès du tribunal de commerce de Toulouse. Un échéancier est mis en place, qui s'étale jusqu'en 2017 et doit permettre d'éponger un passif d'environ 5 millions d'euros. Hervé Schlosser démissionne. Il est remplacé par Franck Demay, chargé de mettre en place un plan social drastique, ramenant le nombre de salariés de 49 (équivalents temps plein) à 31. C'est le président d'alors, Pierre Carli, président du directoire de la Caisse d'Épargne Midi-Pyrénées, qui annonce le plan social aux salariés.

2009 : Le groupe Lagardère, actionnaire, sort du tour de table au profit du Stade Toulousain (9 % du capital) et du TFC (9 %). La régie commerciale de TLT est confiée à La Dépêche du Midi. L'expérience dure 3 ans et se solde par un échec, les recettes publicitaires n'étant pas à la hauteur des objectifs.

2010 : Le journaliste, écrivain et réalisateur René Grando, ancien grand reporter à La Dépêche du Midi, remplace Pierre Carli à la présidence de TLT. Il estime qu'alors qu'il manque 1 million d'euros à TLT pour fonctionner correctement.

2012 : La régie publicitaire est retirée à La Dépêche du Midi mais n'est pas remplacée. Franck Demay, qui dénonçait cette stratégie depuis le début, est démis de ses fonctions.

Avril 2013 : Emmanuel Schwartzenberg est nommé PDG de TLT suite à la non-nomination de Philippe Joachim (le directeur de cabinet de Martin Malvy au Conseil régional avait été nommé à la tête de TLT en décembre 2012 par le conseil d'administration de la chaîne. La commission de déontologie de la fonction publique a alors émis un avis négatif à la nomination de Philippe Joachim, poussant celui-ci à renoncer au poste). Emmanuel Schwartzenberg demande à ses actionnaires de pouvoir embaucher des commerciaux, en vain. La situation s'aggrave pour TLT, qui est toujours sous le coup d'un plan de continuation.

--> L'actuel PDG de la chaîne, Emmanuel Schwartzenberg

Novembre 2014 : Retour devant le tribunal de commerce de Toulouse pour non respect du plan de continuation. Le tribunal donne 3 mois à TLT pour régulariser sa situation.

6 mars 2015 : TLT est incapable de payer ses dettes et la Mairie cherche activement un repreneur. Le tribunal laisse 2 mois de sursis à TLT. Les relations se tendent en interne entre salariés et direction. Une motion de défiance est votée à l'égard d'Emmanuel Schwartzenberg. TLT devient un enjeu politique : la nouvelle municipalité de droite accuse Pierre Cohen (ancien maire PS) d'avoir laissé TLT dans une situation de mort clinique. Ce dernier renvoie la balle, assurant que Jean-Luc Moudenc veut laisser mourir la chaîne.

--> Audience du 6 mars 2015 à huis clos. Les salariés attendent dans le couloir.

20 mai 2015 : les salariés de TLT organisent une soirée de soutien. Ils refusent la liquidation judiciaire.

Concert de soutien TLT

--> Concert de soutien à TLT le 20 mai à La Dynamo

29 mai 2015 : Nouvelle audience. La liquidation judiciaire n'a pas été prononcée, mais les espoirs sont de plus en plus minces. Le tribunal annonce une nouvelle audience le 3 juillet. Un délai d'un mois qui permet surtout d'évaluer les possibilités de reclassement.

3 juillet 2015 : Cette date marquera sans doute la fin de TLT telle qu'existait jusqu'à présent. En effet, selon plusieurs sources, il semble peu probable qu'un repreneur rachète TLT avec toutes ses dettes. Néanmoins, il est possible que quelqu'un se manifeste après la liquidation pour redonner une seconde vie au média, et surtout profiter de la fréquence laissée vacante. Il faudra pour cela attendre la semaine prochaine.
Dans les locaux de la chaîne, une partie du plateau a été démontée. Aujourd'hui, mercredi 1er juillet, les salariés de TLT ne savent pas s'ils doivent se rendre au travail lundi prochain. Sur la vingtaine de salariés, une douzaine d'entre eux a sollicité personnellement la Mairie ou la Métropole pour obtenir un emploi au sein d'une des deux collectivités.

Actionnariat actuel de TLT

CTV : 60%

La Dépêche TV : 17,6%

TFC : 10,1%

Stade Toulousain : 3,9 %

Sud Communication : 8,1 %

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