Exotrail veut devenir un géant mondial de la logistique dans l'espace

Après avoir décroché une série de contrats pour ses moteurs électriques et son bus spatial, Exotrail a l'ambition de devenir un acteur global des services en orbite de la réservation d'une place sur un lanceur jusqu'à l'opération en vol des satellites. La startup implantée à Toulouse et dans la région parisienne compte doubler ses effectifs en 2023.
(Crédits : Exotrail)

« Sur Terre, une société logistique va s'appuyer sur des flottes de véhicules, des entrepôts, des logiciels d'optimisation de flux et d'optimisation de routes pour vous livrer de la façon la plus efficace possible votre colis au moment ou vous l'avez demandé et à un endroit spécifié. Exotrail veut faire la même chose dans l'espace. Nous voulons devenir un acteur mondial de la logistique de l'espace », lance Jean-Luc Maria, CEO d'Exotrail.

Montée en puissance des moteurs pour les petits satellites

Fondée en 2017, la startup implantée à la fois dans la région parisienne et à Toulouse s'est d'abord fait connaître pour sa gamme de moteurs pour les petits satellites. Exotrail a miniaturisé la technologie à effet Hall utilisée sur les grands satellites à des orbites géostationnaires et qui permet une poussée cinq à dix fois plus importante que les autres technologies de propulsion électrique pour l'implémenter sur les petits satellites en orbite basse. Une innovation qui se traduit par des temps de manœuvre plus courts jusqu'à l'orbite finale et donc de gagner plusieurs mois d'activité dans l'espace.

La jeune société a déjà décroché une série de contrats pour ses deux premiers moteurs respectivement de 50 watts pour les nanosatellites (ces petits satellites pesant jusqu'à une dizaine de kilos) et de 150 watts pour les microsatellites (jusqu'à 250 kg). Exotrail observe une forte traction commerciale pour son moteur pour microsatellites avec notamment une livraison imminente pour la société américaine York Space Systems en vue d'une mission lunaire.

« Ces dernières années, le marché des petits satellites est en train d'évoluer des nanosatellites vers des satellites de 100 kilos. Le coût d'accès à l'espace continue à diminuer et un satellite plus grand reste plus performant quand il est un peu plus grand. Notre moteur pour les microsatellites est quasiment unique sur le marché. Nous le vendons beaucoup en Asie, aux Etats-Unis, en Europe », commente Jean-Luc Maria.

Pour accompagner cette prise de masse des satellites, Exotrail est en train de développer un nouveau moteur de 300 à 600 watts. Un produit sur lequel la startup a signé en septembre dernier un accord de partenariat avec Airbus pour répondre aux besoins de ses satellites de moyenne taille, en particulier d'observation de la Terre.

Multiplier les possibilités de lanceurs pour le SpaceVan

En parallèle, Exotrail développe entre Massy et Toulouse son SpaceVan, un bus spatial qui pourra à terme transporter jusqu'à 400 kilos de petits satellites vers la bonne orbite. « Cela peut être des petits satellites qui n'ont potentiellement pas besoin de propulsion ou alors de très faibles besoins et dans ce cas, ce qui les intéresse c'est un service de transport plutôt que de complexifier leurs satellites par l'ajout d'un moteur. Pour d'autres clients, il existe à la fois un besoin de transport jusqu'à la position finale et d'un système de propulsion à bord pour faire toutes les manœuvres pendant toute la durée de vie du satellite », détaille le dirigeant.

Le premier bus spatial sera lancé depuis une fusée SpaceX en octobre 2023. Deux à trois vols supplémentaires sont prévus en 2024 pour atteindre ensuite un régime de croisière de cinq à dix vols par an. Pour offrir un maximum de créneaux de lancement à ses clients, Exotrail a déjà signé des accords avec Arianespace pour des vols sur Ariane6 et Vega et puis début novembre un contrat a été signé avec Isar Aerospace.

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L'acteur du NewSpace planche aussi sur de nouveaux cas d'usages du bus spatial.

« La stratégie d'Exotrail est de faire évoluer le véhicule pour aller offrir de nouveaux services en orbite autres que la logistique du dernier kilomètre pour aller livrer le satellite jusqu'à la bonne orbite. Cela peut être de l'extension de durée de vie, du ravitaillement en carburant, des services de dépollution de l'espace. Ces cas d'usage sont intéressants notamment pour les constellations de satellites. Les satellites ont une durée de vie définie de quelques années. Certains peuvent tomber en panne et il faudra aller repeupler les différents plans dans l'espace. Cela peut être aussi un outil pour réguler le trafic spatial », ajoute Jean-Luc Maria.

Au-delà du bus spatial, la startup veut commercialiser toute une série de services en orbite, de la réservation d'une place sur un lanceur jusqu'à l'opération en vol des satellites en passant par un logiciel de conception vision. « C'est un positionnement assez unique à l'échelle mondiale. Actuellement, nous avons des concurrents uniquement sur la logistique du dernier kilomètre ou l'activité de propulsion mais il n'y a personne qui a cette vision globale pour créer un nouveau modèle », estime l'entrepreneur.

Porte-parole du New Space en France et en Europe

Un nouveau modèle économique que Jean-Luc Maria porte aussi au niveau des décideurs français et européens. Exotrail fait partie du Club des sept mis sur pied par le ministre de l'Économie Bruno Le Maire avec sept entreprises qui ont vocation à représenter l'écosystème du New Space français auprès des institutions. La jeune société fait aussi partie des membres fondateurs de l'association YEESS pour mieux intégrer les contrats institutionnels en Europe.

« L'enjeu à la fois en France et en Europe est de faire prendre conscience aux pouvoirs publics d'une nouvelle composante entrepreneuriale dans l'écosystème spatial qui s'ajoute aux agences et aux acteurs historiques. Et derrière le message, c'est d'arriver à avoir une bonne capacité de financement et d'aller assez vite sur des contrats de services. Si les pouvoirs publics mettent un euro sous forme de contrats, cela permet de dégager potentiellement cinq euros d'investissements derrière notamment via des fonds d'investissement. C'est vertueux parce que cela crée de l'emploi sur le territoire », avance Jean-Luc Maria.

Dans cette perspective, Exotrail vient d'être lauréat du premier appel à projets du plan France 2030 sur le sujet des services en orbite. « L'action menée depuis plusieurs mois, avec le Club des sept en particulier, est en train de porter ses fruits. L'étape d'après, c'est d'en faire de même au niveau européen », ajoute-t-il.

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Exotrail compte aujourd'hui 80 salariés dont 25 à Toulouse. Elle prévoit de doubler de taille en 2023 avec des recrutements de chefs de projet et d'opérateurs de production à Massy et d'ingénieurs sur la partie logicielle dans la Ville rose. Après une première levée de fonds en 2018 de 3,5 millions d'euros puis une seconde de 11 millions d'euros en 2020, la startup réfléchit à un nouveau tour de table de série B pour accompagner sa croissance et notamment s'internationaliser aux États-unis et en Asie.

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