Santé : les Laboratoires Phodé à Albi, 20 ans d'une réussite familiale

Les Laboratoires Phodé fêtent cette année leurs 20 ans. Spécialisée dans les molécules olfactives et l'écosystème cérébral, l'entreprise basée à Albi s'agrandit. Retour sur l'histoire de cette société fondée par Daniel Éclache, qui compte aujourd'hui plus de 100 salariés pour un chiffre d'affaires de 20 M€.
Les nouveaux locaux des Laboratoires Phodé inaugurés le 27 avril à l'occasion des 20 ans de l'entreprise

Non, Toulouse ne concentre pas toutes les pépites de l'économie régionale. En pointe dans leur secteur très spécifique, c'est à Albi que les Laboratoires Phodé ont décidé de poursuivre leur développement, 20 ans après leur création. "Nous doublons toutes les surfaces : la production, le stockage, les laboratoires et les bureaux", précise le PDG et fondateur Daniel Éclache. Après un investissement de 3 millions d'euros, la société bénéficie désormais de locaux de 4 000 m2 sur la zone industrielle Albipôle.

Celui qui a fondé les Laboratoires Phodé en 1997 (après avoir notamment exercé comme vétérinaire libéral puis occupé le poste de directeur scientifique chez Sanofi Santé animale) a la volonté de s'intégrer dans l'écosystème régional. "Je suis parti d'une feuille blanche avec ma femme", explique ce spécialiste de l'hormonologie de la reproduction. De ses recherches, Daniel Éclache avait acquis des connaissances sur les neuromédiateurs (substance chimique  fabriquée par l'organisme et permettant aux neurones de se transmettre un message entre elles, NDLR) et notamment leur implication dans de nombreux phénomènes comme le stress ou l'appétit, et leur interaction avec un certain nombre de molécules olfactives.

"Faire de l'écologie sans la chemise à fleur"

"J'avais envie de développer un groupe humain qui prend du plaisir autour du projet scientifique, détaille Daniel Éclache. J'ai toujours été responsable de ce que je faisais et j'avais enfoui en moi la création de quelque chose. J'avais un certain nombre de certitudes dans le domaine de la santé et le désir de créer une structure différente."

En cohérence avec la spécialité de leur fondateur, les Laboratoires Phodé ciblent dans un premier temps le marché animal avec l'objectif d'amener du mieux-être aux animaux, "qui vivent en univers carcéral" (élevages intensifs NDLR), sans les bourrer de médicaments, d'anxiolytiques ou d'antibiotiques. Le tout avec une volonté d'utiliser uniquement des composants et des extraits végétaux. "La nature est bien faite, martèle Daniel Éclache. Elle nous apporte tout ce dont on a besoin. Il faut simplement savoir le trouver et l'exploiter. L'objectif était de faire de l'écologie sans la chemise à fleur."

Adepte des formules, le sexagénaire voit en effet dans l'utilisation de produits écologiques et naturels une démarche citoyenne davantage qu'un engagement politique.

"Je suis un anti-écolo revendiqué lorsqu'il s'agit d'écologie politique. Je suis dans une démarche scientifique et rigoureuse, parce que les produits naturels sont extraordinaires. Chez Sanofi, j'ai vu les dégâts que pouvaient faire les produits artificiels. Bien managée, la nature est un immense réservoir."

Laboratoires Phodé

Les nouveaux locaux de Phodé ont nécessité un investissement de 3 M€ (© photo Richard Storchi)

Trois secteurs d'activité

Aujourd'hui, 20 ans après ses débuts, l'entreprise compte une centaine de salariés sur le site tarnais, une filiale en Chine qui emploie une dizaine de personnes, et 4 personnes qui travaillent sur le grand export. Sur les 20 millions d'euros de chiffre d'affaires enregistrés en 2016, 70 % proviennent en effet de l'export, un virage pris dès le début des années 2000. Une réussite portée par une volonté continue d'innover et de rester en pointe dans les domaines d'expertise. Les Laboratoires Phodé réinvestissent ainsi chaque année 20 % du CA dans la R&D.

"Une dizaine de personnes travaille sur la recherche, précise Daniel Éclache. Nous sommes très en avance sur la recherche sur le cerveau notamment. Nous avons monté une équipe pluridisciplinaire avec différents laboratoires, qui est la première dans le monde en matière d'imagerie cérébrale."

Phodé travaille ainsi en collaboration avec le CNRS, l'Inra, l'Université de Toulouse, l'Institut National Universitaire Champollion et des universités américaines comme Penn State. "Ce que nous avançons sur nos produits en terme d'impact sur le comportement, nous pouvons le vérifier visuellement en observant des zones du cerveau qui s'activent ou qui sont inhibées."

Une volonté d'innovation également présente dans les deux secteurs investis par la société après le bien-être animal. La division Human Care s'adresse aux industries agroalimentaires et pharmaceutiques. Les laboratoires travaillent par exemple sur le sevrage tabagique et a développé des liquides pour e-cigarettes sous la marque Sense. Dans la branche Olfacitic, Phodé assure avoir développé des brevets mondiaux pour la destruction de mauvaises odeurs, toujours à partir de molécules naturelles. La société albigeoise compte donc des clients aussi variés que des fabricants d'aliments, des laboratoires médicaux, des industriels ou des maisons de retraite.

Pour rester en pointe sur leur secteur, les Laboratoires Phodé misent également beaucoup sur l'intelligence économique, souvent délaissée par les PME. Une personne se consacre à plein temps à cette question car "il faut être à l'écoute du monde pour connaître les tendances mondiales et les évolutions".

Une entreprise à part ?

Société familiale où Benoit Éclache, fils du fondateur, occupe le poste de directeur de l'activité e-liquide, les Laboratoires Phodé se sont appuyés sur un capital familial tout au long de son développement. Fin 2016, le fonds Oraxys - qui se présente comme un spécialiste du sustainable private equity - a cependant fait son entrée au capital pour accompagner la croissance de l'entreprise. "Ce fonds familial est destiné à rester 15 ou 20 ans, tempère Daniel Éclache. Dans l'accord, nous avons notamment convenu qu'il n'y aurait pas de dividendes."

Une précision qui a son importance car les Laboratoires Phodé se présentent comme une "entreprise citoyenne". Un terme qui peut recouvrir pas mal de choses mais qui a une signification bien claire pour son président-fondateur, au-delà de la démarche écologique de la société.

"Phodé est une entreprise un peu particulière. Les salariés sont bien, il y a un très fort sentiment d'appartenance", assure-t-il.

Le bien-être au sein de l'entreprise est ainsi mis en avant, de même que l'implication dans la vie locale. "Nous faisons beaucoup de mécénat, ajoute Daniel Éclache, notamment culturel, avec le festival Pause Guitare par exemple. Cela permet aussi aux salariés de passer un bon moment."

Objectif ETI

Encouragée par ses bons résultats, la société affiche toujours plus d'ambition et une volonté de croissance très forte. "Nous voulons aller le plus vite possible vers une ETI, d'ici 5 à 7 ans", affirme Daniel Éclache. Pour cela, les Laboratoires Phodé vise une croissance de 20 à 30 % par an en continuant à se développer "malgré les contraintes":

"L'objectif est de rester à Albi même si aujourd'hui il faut vraiment être chauvin pour rester en France. Il faudrait beaucoup moins de contraintes. L'Europe et la France souffrent de trop d'administration et l'UE est une catastrophe au niveau de la réglementation", assure le président de la société tarnaise, qui précise tout de suite : "Attention, je ne suis pas anti-européen."

Ce qu'il fustige, c'est une réglementation qu'il juge "mal contraignante". "Il y a évidemment de nombreux domaines où on ne peut pas laisser faire n'importe quoi, mais le problème vient de la mainmise d'une réglementation qui manque d'humain, d'intelligence. Je suis opposé au principe de précaution systématique. Par exemple, on évoque une éventuelle légère toxicité des e-cigarettes pour les interdire, mais on continue à vendre des cigarettes, que l'on sait mortelles, parce que cela rapporte gros."

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