Cobratex veut équiper les avions et les voitures avec de la fibre de bambou

La startup toulousaine Cobratex a inventé une technologie pour concevoir des tissus industriels à base de bambou. Cette innovation intéresse aussi bien les fabricants de ski que les industriels dans l'aéronautique et l'automobile. En effet, grâce à son poids plume, le bambou permet de limiter la réduction d'émissions de CO2, qui est un véritable enjeu de l'industrie du futur.
Guillaume Beuvelot et Edouard Sherwood, cofondateurs de Cobratex.

"C'est un tel carton qu'au bout de quelques mois nous avions liquidé tout notre stock", s'exclame Edouard Sherwood. Cet ingénieur toulousain né de parents australien et anglais est parvenu à fabriquer de la fibre de bambou.

"En France, le bambou est surtout utilisé dans l'habillement sous forme de viscose après un éclatement chimique des fibres. De notre côté, nous avons développé une technologie qui permet un défibrage mécanique et une soudure des fibres en un dixième de seconde", explique le président et cofondateur de Cobratex. En 2011, il dépose un brevet pour cette technologie avec l'aide de l'École des mines d'Albi et de l'incubateur Midi-Pyrénées et se spécialise dans la conception de tissus à base de bambou. "Nous achetons le bambou brut sous forme de tige. Ensuite, sept étapes de production sont nécessaires pour arriver à une bobine de ruban. Nous travaillons avec des tisserands industriels pour transformer ce ruban en tissu", poursuit Edouard Sherwood.

La startup Cobratex collabore déjà avec la marque lyonnaise Arkaïc pour la conception de skatebord à base de bambou et fait face à un afflux de commandes : "Ce qui plaît, c'est l'esthétique du produit qui est dans l'air du temps", commente-t-il. Le secteur sport et loisirs est celui qui fonctionne le plus au niveau des commandes. Plusieurs fabricants de ski et de raquettes de tennis commencent également à tester notre matière."

cobratex

Skateboads, casque de moto sont entreposées sur les tiges de bambou brut (Crédit : Rémi Benoit).

Les industriels lorgnent sur le bambou pour limiter les émissions de CO2

Mais à terme, Cobratex cherche surtout à conquérir l'aéronautique et l'automobile, deux secteurs qui sont contraints de réduire leur empreinte carbone. Ainsi à compter du 1er janvier 2020, les voitures vendues dans l'Union européenne devront émettre au maximum 95 grammes de CO2 par kilomètre, au lieu de 130 g/km en 2015, sous peine de pénalités financières imposées aux constructeurs. De même, les avionneurs ont acté un mécanisme mondial de compensation des émissions carbone (Corsia pour son acronyme anglais) avec l'objectif d'ici 2035 de maintenir, au pire, les volumes d'émission du transport aérien observés en 2020.

Par conséquent, les industriels s'intéressent de près aux fibres naturelles :

"Le lin a 40 ans d'avance sur nous et a clairement ouvert la voie à d'autres matériaux comme le bambou. Grâce au lin, les industriels se sont aperçus de la valeur ajoutée à utiliser des fibres naturelles : meilleure absorption des chocs et vibrations, gain de poids. Ainsi, le bambou est trois fois plus léger que le verre et quasiment deux fois plus léger que le carbone : diminuer le poids, c'est réduire la consommation de fuel", avance Edouard Sherwood.

"Dans l'aéronautique, 500 grammes de gains de masse font économiser 10 000 dollars de fuel à l'année sachant que le carburant est le premier poste de dépense. Dans l'automobile, la réduction de 10% de masse permet d'économiser 7% en carburant, complète Guillaume Beuvelot, cofondateur de Cobratex.

Les constructeurs et les acteurs du transport cherchent à réduire la consommation d'énergie pour le moteur mais à répondre également aux contraintes environnementales. L'impact dans les comptes d'exploitations se fait ressentir et puis les clients se disent de leur côté 'si je consomme moins de carburant, cela permet d'économiser sur mon budget voiture'".

Grâce à son projet, la startup a pu déjà être sélectionnée (aux côtés notamment de la société gersoise Veso Concept) pour le programme européen de recherche Clean Sky, qui vise à poursuivre les travaux sur l'avion "vert". "Nous devions développer une fibre continue de bambou adaptée à l'aéronautique sous forme de renforts de composites, notamment pour l'aménagement intérieur de l'avion. Le démonstrateur était un meuble à roulette (cabinet). Notre startup aimerait également concevoir des sièges et des rangements pour l'aménagement intérieur des avions. À terme, notre société souhaite se tourner vers des pièces plus structurelles comme le "belly faring" (ventre mou sous les avions) ou des coques de bateaux pou le secteur maritime", poursuit le président de Cobratex. La startup s'est par ailleurs rapprochée d'une association de cultivateurs de bambou qui cherche à créer une filière 100% made in France en la matière.

Pour être suffisamment compétitif face à la fibre de carbone, Cobratex espère à terme vendre sa fibre de bambou entre 5 et 10 euros le m2. Un objectif réalisable à condition de produire à très grande échelle. Pour l'instant, la jeune société réalise l'équivalent d'1 m2 de tissu par jour en production continue, une goutte d'eau comparés aux 5 millions de tonnes de carbone vendus chaque année.. En se dotant d'une nouvelle ligne de production, elle espère atteindre l'équivalent d'1m² par minute et souhaite disposer à terme de quatre lignes.

Implantée pour le moment dans la zone industrielle de Fenouillet, la startup espère réaliser cette année une levée de fonds pour financer la nouvelle ligne de production et embaucher 5 à 10 salariés. En parallèle, elle lance le 30 janvier une campagne de crowdfunding sur la plateforme Wiseed avec pour objectif de récolter plusieurs centaines de milliers d'euros.

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Commentaire 1
à écrit le 05/02/2017 à 14:34
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Intéressant. Corbatex est en vote pour décider ou pas d'une levée de fonds sur la plateforme de financement participative toulousaine Wiseed.

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