Sommet économique du Grand Sud : le bilan des deux premières tables rondes

Ce premier Sommet économique du Grand Sud s'articulait autour de trois tables rondes qui s'intéressaient aux 4i, infrastructures, intelligence et innovation et international. Compte-rendu des deux premières tables rondes.
La deuxième table ronde était consacrée à l'innovation et l'intelligence

LA TABLE RONDE INFRASTRUCTURE
« Comment les nouvelles infrastructures sur nos territoires vont impacter nos relations économiques ? » Les intervenants de la première table ronde, animée par Emmanuelle Durand-Rodriguez, rédactrice en chef d'Objectif News et Marc Ivaldi, économiste à la Toulouse School of Economics, étaient invités à débattre autour de cette question.

Marc Ivaldi a introduit le débat. Prenant l'exemple du Canal du midi qui a inspiré Adam Smith pour sa réflexion sur la richesse des nations, il a rappelé « le rôle des infrastructures dont l'amélioration permet d'élargir les marchés, d'augmenter les échanges, le commerce, la production, et donc la croissance économique. Mais ce cercle vertueux a des limites. Trop d'infrastructures de transports tuent la croissance car elles limitent les crédits pour financer d'autres infrastructures. » L'économiste de TSE a également souligné l'importance de l'évaluation économique des grands projets, notamment dans cette période où la dette des collectivités est énorme. Marc Ivaldi a aussi posé la question de la gouvernance des infrastructures.

La LGV en question
Un court reportage sur la future LGV a ensuite permis de donner la parole à des usagers ainsi qu'à Emmanuel Gadret, associé Deloitte pour le Grand Sud-Ouest qui évoque le rapport Deloitte sur les effets économiques du TGV. Selon lui, « seules des dessertes locales adaptées renforcent les échanges économiques. Il est nécessaire de bâtir une ambitieuse stratégie de développement économique autour de ce projet. » Il pose également la question suivante : « Faut-il prolonger la LGV Bordeaux - Toulouse jusqu'à Montpellier pour faciliter le développement économique ? »

Patrick Stefanini a fait un point sur les dates d'arrivée de la LGV. Le préfet de la région Aquitaine, également préfet coordonnateur du Grand Projet ferroviaire du Sud Ouest (GPSO), s'est montré confiant quant à l'avenir du projet qui « se fera. La décision sur le tracé définitif doit se faire au printemps et les travaux pourraient démarrer en 2017 pour une mise en service au début de la décennie 2020. »

Le président de Midi-Pyrénées Martin Malvy n'a aucun doute,« l'absence de LGV serait une pénalité indéniable pour le Grand Sud. Etre à 1h de Bordeaux, à 1h30 de Barcelone, à 2h20 de Marseille, cela modifie totalement les relations économiques. » Des propos confirmés par Hélène Mandroux, maire de Montpellier, pour qui « les infrastructures sont absolument indispensables pour l'aménagement, le développement économique et le rayonnement d'une métropole. Sur un plan structurel, la LGV et le doublement de l'autoroute sont très importantes pour Montpellier. » Pour le président de Réseau Ferré de France, Hubert du Mesnil, « les infrastructures sont depuis toujours vecteurs de développement économique. Nous apprécions de voir se développer un dialogue coopératif parce qu'ils doivent être portés par les collectivités. Il faut faire attention de bien penser les infrastructures avec un projet économique, une réflexion.»

Un sujet que Christine Bost, vice-présidente de la Communauté urbaine de Bordeaux, connaît bien. « Nous menons une démarche de préparation à la LGV depuis une dizaine d'années, affirme-t-elle. Le projet Bordeaux Euratlantique et ses 800 000 m2 de constructions, la redynamisation et restructuration de nos campus en sont des exemples. » De son côté Martin Malvy a assuré que l'accompagnement des acteurs économiques à travers les pôles de compétitivité préparait l'arrivée de la LGV.

Financement
Ces questions de financement ont ensuite été au centre des débats. Cyril Luneau, directeur de SFR Collectivités, a plaidé pour « des partenariats public-privé ». De son côté Patrick Stefanini a mis en avant « les revenus générés par ces nouvelles infrastructures. C'est un catalyseur de développement économique. » Il affirme cependant qu'il faut « se réunir pour faire en sorte que l'initiative publique puisse relayer l'initiative privé qui pourrait être défaillante ». Pour Pierre Coppey, président de Vinci Autoroutes et PDG d'ASF, « il faut souligner la vertu du modèle concessionnaire pour financer les infrastructures ».

Le président de Midi-Pyrénées a lui regretté que la France « n'est pas la culture du financement à long terme » soulignant que « la LGV était un investissement pour 40, 50 ou 60 ans ». Il a également mis en lumière la disparition de plusieurs dispositifs de financement. « Le schéma de l' Etat pour les grandes infrastructures, c'est 265 milliards d'euros, a t-il affirmé. 80 milliards pour l'Etat, 97 milliards pour les collectivités mais le reste n'est pas défini. C'est difficile, ne nous cachons pas mais c'est une nécessité absolue. »

Les autres infrastructures
La question des infrastructures va au-delà de la problématique de la LGV. Les autoroutes, les télécommunications et les aéroports sont autant d'infrastructures essentielles au développement économique des régions. Pour Cyril Luneau, « avec les télécommunications, on peut être instantanément de Toulouse à Bordeaux en visioconférence. Les réseaux de télécoms sont importants pour éviter certains transports. Il y a un fort besoin. Nous avons un grand chantier au niveau du développement de la fibre optique. » Selon Gilles Capy, directeur régional d'ERDF Sud-Ouest, « les infrastructures électriques sont déjà construites mais les problématiques d'infrastructures sont devant nous. »

Jean-Michel Vernhes, président de l'Union des aéroports français, a estimé : « Nous avons un bon réseau aéroportuaire dans les 3 régions. Un réseau dense qui n'est pas en concurrence avec la LGV mais complémentaire. Il faut que l'interconnexion fonctionne. Et pourquoi pas aller vers l'intermodularité ? Tout est lié. En termes d'investissement, nous devons anticiper et répondre à la demande future. »

Marc Ivaldi a finalement conclu ce débat en relevant les axes forts de réflexion. « L'importance de l'évaluation économique, de la gestion au jour le jour des infrastructures. Parler d'infrastructures, c'est parler d'avenir, mettre en place des financements à long terme. L'avenir passe par la mobilité, toutes les mobilités. Il faudra également développer le fret qui décroît à une vitesse incroyable. »

LA TABLE RONDE INTELLIGENCE&INNOVATION

La deuxième table ronde autour de l'intelligence et de l'innovation avait pour thème « Comment la coopération interrégionale de l'enseignement et de la recherche peut-elle accélérer la compétitivité du Grand Sud entre les régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées ? » Animée par Alain Ribet, directeur général d'Objectif Aquitaine, elle a permis à Paul Seabright, économiste à la TSE d'introduire le débat.

Selon lui, « la proximité compte plus que jamais. Il faut des échanges et du suivi pour le développement des technologies. Quels sont les ingrédients d'une localisation efficace ? Il faut des infrastructures évidemment mais aussi une organisation flexible de la recherche universitaire. Qu'est ce qui va permettre au Grand Sud de mettre en avant les atouts qu'il possède ? »

Complémentarité des universités
Pour Manuel Tunon de Lara, président de l'Université de Bordeaux, « les regroupements des universités sont encore devant nous. Nous pensons qu'il faut une masse critique, qu'il faut être visible à l'international. Avec l'autonomie, tout a été fait pour que les universités soient en compétition. A nous de mettre en place des stratégies communes. »

Le président de l'Université de Toulouse, Gilbert Casamatta a confirmé ces propos. « Les concours ont développé chez nous une réflexion de rapprochement. Aujourd'hui, nous sommes à la recherche des complémentarités mais également des différenciations pour ne pas développer des programmes sur lesquels nous sommes moins avancés qu'à Bordeaux par exemple. »

Aerospace Valley est une des rares collaborations véritablement installées entre Aquitaine et Midi-Pyrénées. Pour Agnès Paillard, « il y a une vraie volonté de travailler en commun dans les laboratoires de recherche au sein de ce pôle et c'est ce qui fait son succès. »

Le rôle des collectivités
Les collectivités ont également un rôle important à jouer dans le développement de la recherche et des innovations. « La région Aquitaine consacre 10 % de son budget à la recherche, soit trois fois la moyenne nationale, explique Alain Rousset, président du Conseil régional. » Il a mis en garde contre la recentralisation et la mise en place des conseillers territoriaux qui vont selon lui « tuer les régions et donc les politiques d'innovation. Toutes les études économiques montrent que l'innovation est portée par les régions partout en Europe. La France est le seul pays à se recentraliser. »

Jean-Pierre Moure, président de la Communauté d'agglomération de Montpellier, a tenu à rappeler l'importance de « la collaboration entre les régions. Le Grand Sud est pertinent en termes d'innovation, nous devons tout faire pour faciliter ce développement. » Une démarche d'interrégionalité que « l'Etat soutient » selon le préfet de région Midi-Pyrénées, Henri-Michel Comet. « Ce sont des choix durables. L'Etat a beaucoup misé sur ces questions d'intelligence, de recherche et d'innovation. Nous avons confiance en l'aspect local des choses. »

Attentes des entrepreneurs
Christian Desmoulins, président du directoire d'Actia Group souligne le besoin « d'une recherche technologique, capable par exemple de faire passer une innovation du stade de maquette à une pré-série. Elle existe en France mais pas dans le Grand Sud. Les universités vont vers une plus grande spécialisation des sites donc la coopération des universités est nécessaire. »

Veolia a anticipé cette coopération interrégionale en créant « un campus de formation Sud-Ouest à Tarbes » comme le rappelle Christophe Boissier, directeur régional de Veolia Eau région Sud-Ouest et délégué régional de Veolia Environnement. La collaboration privé-public est également importante à ses yeux et
« le pôle de compétitivité Eau est un bel exemple de coopération interrégionale et privé public ».

Pour Christophe Carniel, président de Netia, « l'innovation a été le moteur de notre croissance. La proximité avec les laboratoires de recherche a été un atout. Transférer de la technologie, c'est d'abord l'identifier et pour cela il faut des échanges. »

Paul Seabright a conclu ce débat en relevant « deux paradoxes. Tous les acteurs ont des ambitions mondiales mais tous mettent l'accent sur l'importance des collaborations et des proximités. Nous insistons également sur la concentration des ressources mais en même temps pour l'innovation il faut être ouvert aux autres, il faut décloisonner. Les régions, qui dans le passé ont pu poursuivre leurs objectifs dans leur coin, doivent tirer avantage de leur complémentarité. » Alain Rousset a tenu à répondre affirmant « qu'il ne faut pas opposer la région à la coopération et à l'interrégionalité. »

Paul Périé

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